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27 février 2002

Trahison

En cette presque fin de février, il fait un froid terrible. Le thermomètre affiche moins cinq. Je me couvre bien, et bravant ce vent glacial je descends jusqu’au métro.

Le mardi Ghyslaine ne travaillant pas, je mange avec Lise et ne parle de rien. Mon amie me téléphone dans l’après-midi pour m’expliquer qu’elle a demandé à Marc, comment était l’appartement d’Alexandre, devant les questions de son mari, elle a été obligée de lui parler vaguement sans trop de détails du scandale qui risquait d’éclater pour ce médecin tout fraichement installé.
Marc lui a expliqué exactement par un plan toutes les pièces. L’entrée et le petit couloir, la pièce à vivre, la cuisine, les deux chambres, le bureau, la salle de bains et même les toilettes et, il a été jusqu’à lui décrire l’ameublement.

Je demande à mon amie, ce qu’elle compte faire avec ça. 

... Demain nous allons manger avec elle, et je vais te demander un truc style, comment tu trouves la cuisine de ton cousin ?

.... Pourquoi la cuisine ?

... Comme ça, Marc me dit qu’elle est rouge-bordeaux, ce n’est pas commun surtout pour un homme.

... Non bien sûr, mais quand tu vas chez quelqu’un tu ne vas pas spécialement dans la cuisine

.... Oui tu as raison, bah on prend quelle pièce ?

.... A savoir déjà où il est censé l’avoir déflorée, dans la chambre, dans le salon ?

Mon amie rit .... Bah écoute on parle de tout l’appartement, comme si nous avions visités suite à une invitation.

... D’accord, et ?

... On mélange les couleurs et on raconte n’importe quoi, mais en nous mettant d’accord pour que ce soit plus crédible.

.... Et c’est ça qui disculpera Alexandre ?

Ghyslaine rit ... Tu es longue à la détente ma belle.

Je souris à mon tour, elle m’explique une partie du plan pour confondre Christine et lui faire avouer qu’elle ne connait pas l’appartement du cousin. Ensuite il faudrait savoir quel jour ça se serait passé

... De toute façon avec les pointages, en une heure ça parait improbable, sauf en septembre ou effectivement elle a pris deux fois deux heures. Je suis remontée depuis les grandes vacances.

... Nous verrons demain ma belle, mais je t’assure que je vais l’acculer au pied du mur.

... Oui, enfin, ça sera toujours sa parole contre la nôtre

... Oui sauf que là nous serons deux, et qu’elle ne pourra pas dire qu’on ment

... Oui sauf qu’on est les deux amies les plus proches et qu’on peut être de connivence.

Un long soupir me parvient dans l’oreille .... Tentons, il faut mettre fin à cette histoire, tu te rends compte, pour un peu si elle change de version et qu’elle dit viol au lieu de défloraison ?

Je pousse aussi un soupir de détresse, j’en aurais presqu’envie de pleurer. D’une part de m’être autant trompée sur cette fille, d’autre part, du scandale qui pourrait être étalé au grand jour, dans les journaux.

Le soir à table j’essaie d’être enjouée et de ne rien montrer à mon mari, au risque qu’il m’intime l’ordre de ne pas aller au bureau, me croyant fatiguée.

Dans notre lit, je l’entreprends d’une manière très suggestive, en reposant sur le côté il rit .... Madame Jorelle qui m’aurait dit que vous aviez un tempérament de feu ?

Je glousse en enfouissant ma tête dans le creux de son bras.

Ce matin Matthieu me dit que je peux venir que cet après-midi, Patrick étant absent jusqu’à la fin de semaine, je n’aurai que son courrier, et il n’y a rien d’urgent. Je ne réponds pas et pars comme d’habitude pour être à 10 heures au bureau.

Je mets un soin particulier à mon maquillage et ma coiffure, en moi-même je pense qu’il me faudrait faire couper mes cheveux de quelques centimètres. Pour cela je demanderai à mon mari d’aller chez manou, Bénédicte est la seule à me satisfaire et je suis toujours ravie de son bon goût

Ghyslaine me téléphone à midi pile .... Salut ma belle, je suis dans le bureau de Christine, ça te dit qu’on mange avec elle ?

Je fais la fille super enjouée ... Bah pire, oui. Je n’ai même pas le temps d’aller l’embrasser, la pauvre

.... Ok on se retrouve dans le hall.

... D’accord

J’enregistre la lettre que j’ai commencé, ferme la page et mon pc. J’éteins le dictaphone, quand soudain une idée me vient à l’esprit. Je vais dans le bureau de Patrick et rafle le sien qui est sur le bureau, je vérifie qu’il soit à zéro sans aucun message

Je le range dans la poche de mon manteau. Bon ça fait un peu gros, et ça se voit, je le glisse dans mon sac.

J’embrasse Christine, à contre cœur, tout en faisant semblant d’être ravie de la voir. Je vais saluer madame Morane, lui dit quelques mots gentils. Nous partons.

Sur le trottoir, nous décidons d’aller à la Casa. Je m’arrange pour être dans le coin, et pose mon sac sur le bout de la table, je fais celle qui farfouille dedans et appuie sur enregistrement.

Je fais un grand sourire à Christine ... Alors, tu vas bien ?

... Oui pourquoi ?

Je souris ... Bah pour savoir, le boulot pas de souci ?

... Non pas spécialement.

Je jette un coup d’œil à mon amie, Christine est fermée, et il va être difficile de la faire parler

.... Tu as un problème ? Je ne te sens pas en pleine forme.

... Non pas de problème en particulier.

... Pas en particulier mais il y en a un quand même non ?

La serveuse vient prendre nos commandes, j’attends qu’elle reparte et d’une voix que je veux douce et complice

.... Christine, nous sommes tes amies, tu sais que si quelque chose te tracasse tu peux nous en parler.

Sa réponse me déroute .... Tu te dis mon amie.

.... Comment ça ? Bien sûr que tu es mon amie, tout comme Ghyslaine, vous êtes les seules amies que j’aie

... C’est pour ça qu’en famille tu ne m’adresses pas la parole, ou alors tu m’envoies des vacheries dans la tête

.... Je ne te parle pas ? Tu as vu ça où ?

... Samedi tu ne m’as pas adressé un mot

Je commence à m’énerver ... Dis-moi Christine, tu ne te fous pas un peu de ma gueule ? Quand je te demande si tout va bien, ta réponse est inévitablement .... Bah oui pourquoi ?

... Et tu veux que je te réponde quoi ?

... Je ne sais pas, que tu me parles de ce que tu fais au boulot, si je demande c’est pour entamer un pseudo sujet et je te laisse démarrer

... Je n’ai rien à raconter, tu veux que je te dise ce que j’ai mangé chez ton père ?

... Oui pourquoi pas ? Ou quand tu sors, ou ce que tu regardes à la télé, ce que tu bouquines, je n’en sais rien moi

... Quand je sors, à part avec ton père et ta belle-mère je ne sors pas, même plus avec ta grand-mère

Ghyslaine sourit à Christine ... Tu sais moi aussi, c’est maison boulot, Mélissandre, pareil, mais nous en parlons, il n’y a rien de bien méchant. Par exemple le midi, pourquoi tu ne viens pas manger avec nous ?

La serveuse amène nos assiettes qu’elle dépose devant chacune de nous, nous la remercions. D’emblée Christine prend son couteau et sa fourchette.
Je repose la question ... Pourquoi le midi tu attends toujours qu’on t’invite, pourquoi tu ne montes jamais boire un café avec moi ?

Elle hausse les épaules ... Je ne sais pas si je ne vais pas déranger.

... Christine, tu ne pousses pas un peu là ? Je nous pensais suffisamment liées pour être honnête l’une envers l’autre

... Comment ça.

...... Si tu m’appelles pour manger, je vais te dire oui ou non, ce n’est pas plus compliqué, comment on fait avec Ghyslaine ?

Ghyslaine tout en coupant des parts de sa pizza demande, sans lui laisser le temps de réfléchir ... Mais alors le midi tu manges avec qui ?

... Avec les filles du bureau

... Tous les midis ?

... Bah oui pourquoi ?

... Et vous parlez de quoi ?

... De rien en particulier.

... Donc tu sais faire.

Christine regarde Ghyslaine de travers .... Pourquoi ?

Gi ... Pourquoi quoi ?

... Pourquoi tu me dis ça

Je sens que la conversation va tourner en rond. J’interviens

...... Mais si tu manges tous les midis avec les filles, tu ne vas jamais te balader ?

....... Comment ça me balader ? Je n’ai pas le temps en une heure

....... Ma chérie, nous avons des heures flexibles, tu pourrais prendre deux heures pour je ne sais pas faire les magasins par exemple

....... Je les fais le samedi avec ta belle-mère.

...... Et quand tu mangeais avec Alexandre, tu prenais qu'une heure ? Vous n’avaliez pas un sandwich quand même

Elle se rembrunit ....... Oui je prenais deux heures, c’est arrivé deux fois, après il m’a dit qu’il n’avait pas le temps

....... Ma chérie, tu sais le midi, souvent il est en consultation, il a un boulot chargé

....... Ah ! Et donc le midi, il ne mange pas.

...... Si mais je suppose sur le pouce et quand il peut

Elle baragouine un truc que je ne comprends pas. Nous mangeons en silence. Je suis contrariée, on ne lui a rien soutiré qui puisse faire que. Je repousse mon assiette, sans finir ma pizza. Ghyslaine non plus, ne termine pas
La serveuse, nous demande si nous voulons les emmener

...... Prends-les Gi, ça vous fera une entrée pour ce soir.

Ghyslaine sourit à la serveuse ...... Je veux bien oui.

La jeune femme repart. J’essaie de faire durer le repas.

....... On prend un dessert ? J’ai envie d’une glace.

Ghyslaine rit ....... Gourmande.

Je fais l’étonnée .... Christine, tu n’as pas envie d’une glace ?

.... N’importe !

Nous commandons des glaces. Sans attendre Ghyslaine attaque carrément dans le vif du sujet

...... Les filles vous êtes allées chez Alexandre ?

Je fais la fille désabusée ........ Bah non pas depuis que son appart est fini. Il ne nous a même pas invités.

Gi ....... Ah bon, bah quand même. Il nous a invité avec Marc

....... Tu en as de la chance toi.

Je me tourne vers Christine ...... Et toi tu as été invitée à visiter ?

...... Ah non, je n’ai pas eu cette chance.

Gi ....... Comment ça ? Tu sors avec lui, et il ne t’invite même pas chez lui ?

La fille pose les coupes devant nous, je ne m’en occupe pas et continue. ...... Christine tu as bien été chez Alexandre.

....... Tu me prends pour une menteuse ?

.... Non ma biche, ce n’est pas ce que je voulais dire, mais j’étais persuadée que tu étais déjà montée chez lui.

...... Juste le jour du pot et on était tous ensemble

....... Ah donc ce jour-là, tu es montée.
....... Non pas du tout, je l’ai aidé à préparer c’est tout !

...... Oui enfin, quand il te demandait de l’aide pour décorer, tu ne t’investissais pas non plus

...... Ce n’est pas chez moi, il peut bien faire comme il veut

...... Mais ma chérie, quand on est en couple on fait les choses à deux.

....... En couple ? Quel couple ?

Je la regarde faisant l’étonnée ....... Vous étiez bien en couple, vous avez bien eu des rapports. Si on couche c’est qu’on aime non ?

Elle me fusille du regard, je ne me laisse pas impressionnée

....... Christine, vous avez fait l’amour ou pas ?

...... Je n’appelle pas ça faire l’amour.

....... Il ne t’a pas violé, tu étais consentante, donc ça s’appelle faire l’amour chez moi.

Ghyslaine qui ne veut pas être en reste demande comment je sais ça.

....... Ma Gi ce n’est pas à moi de te parler des ébats de Christine et Alexandre dans le parc de Neuilly !

Christine me foudroie du regard et pleine de hargne me jette à la figure ...... Ne te gêne pas, raconte à tout le monde, qu’il m’a prise sur la pelouse chez sa tante

J’essaie de réprimer ma colère, je ne veux pas qu’elle arrête là les révélations.  ...... Christine, ne déforme pas la vérité.

..... Quelle vérité ?  

..... Christine je connais le parc de Neuilly comme ma poche, c’est bien toi qui lui faisais une fellation, ce n’est pas lui qui te l’a mise dans la bouche !

...... Et alors ? Tout ça pour me dire à Noël qu’il me jetait pour ta salope de cousine.

...... Christine n’inverse pas les rôles. Quand on fait une fellation à un mec, bah il faut savoir qu’il a envie d’aller plus loin, même si vous n’êtes pas en relation

Ghyslaine me regarde avec des yeux moitié horrifiés. Elle ouvre la bouche sans pouvoir parler. Sur ma lancée j’enfonce un peu plus le clou en essayant de viser juste, d’imaginer ce qui a pu se passer

........ Ne t’a-t-il pas dit d’arrêter ? N’a-t-il pas demandé ce que tu faisais ? Ne t’a-t-il pas repoussé ?

Elle évite la question ........ Tu lui as dit à ta cousine ? Tu l’as mise en garde aussi ?

..... Christine, on ne parle pas de Lise, on parle de toi. Alexandre t’a violée ou pas ?

Elle éclate d’un grand rire, proche de la crise de nerfs ....... Il n’est même pas capable d’aller au bout d’une pipe !

La colère m’emporte et d’une voix aigüe je lui jette en pleine tête ........ Et c’est pour ça que tu dis à ma belle-mère, à ma grand-mère qu’il t’a violée ?

.... Je n’ai jamais dit ça.

..... Tu as dit quoi alors ?

D’un bond elle se lève, attrape son manteau et pars en courant. Avec Ghyslaine nous restons comme deux connes. La serveuse vient voir si nous voulons des cafés. Je refuse

....... Nous le prendrons là-haut, viens on rentre.

Je règle les trois repas, nous repartons en silence. Je vois Ghyslaine complètement abasourdie.

Je pose les tasses chaudes sur mon bureau et de mon sac sors le dictaphone, Ghyslaine suit mes gestes sans parler.

D’un coup elle comprend et éclate de rire ....... Non tu as fait ça ?

Je souris ....... Comme ça, elle ne pourra pas nier.

J’enclenche la lecture, les voix sont nettes, nous pouvons écouter toute la conversation, et le repas jusqu’au bout.
Je fais deux nouveaux cafés et demande à Ghyslaine ce qu’on en fait.

....... Parles-en à ton mari, et fais-lui écouter.

........ Alors pas avant ce soir, il ne passe pas au bureau

........ D’ac tu me tiens au courant ? Je vais aller voir ta cousine, elle va râler que je prends trop de temps pour manger

Je souris ... Non je ne pense pas, je viens avec toi

Je range le dictaphone dans mon tiroir que je ferme à clé. Je vais embrasser ma cousine, refuse le café et papote un peu avec elle. Je lui dis en partant .... Embrasse tonton et tata

........ Oui t’inquiète

J’ai hâte d’être à ce soir, pour parler à mon mari, et mettre tout ça au grand jour.

En rentrant, je m’installe sur le canapé, avec mes fiches de cours. Matthieu m’a téléphoné pour me dire qu’il ne rentrerait pas tard. Je l’attends avec impatience. J’ai demandé à madame Breton de servir un verre dès que son patron arrive

.... Madame Jorelle, est bien studieuse !

Je lève la tête et sourit, il est là devant moi, dans toute sa splendeur, son sourire tueur aux lèvres. Je me lève avec empressement et vais me coller à lui.

....... Monsieur Jorelle, je suis bien obligée au risque d’être malmenée.
Je le sens taquin et de bonne humeur ....... Madame Jorelle, dans votre état ? Hum j’ai un doute

Je me hisse sur la pointe des pieds et pose mes lèvres sur les siennes. Il force ma bouche, nous échangeons un long baiser qui fait courir des frissons tout le long de mon dos. Je me ressaisis, il ne faut pas que je me détourne de ma mission.
Je l’attire vers le canapé, ramasse mes fiches et les pose sur la table. Madame Breton arrive avec son petit plateau portant deux verres.

Matthieu desserre sa cravate et enlève sa veste qu’il tend à son employée. Je cale mes jambes sous mes fesses et lui demande si tout va bien

.... Oui darling, j’ai fini, et Patrick aussi.

... Super, tu vas pouvoir te poser un peu, je m’ennuie seule à la direction.

Il sourit et trempe ses lèvres dans son whisky. Je demande si ce soir il a du travail

.... Non darling, veux-tu sortir un peu ?

Je fais non de la tête ........ Matthieu j’ai une chose grave à te dire, mais je ne veux pas que tu t’énerves après moi.

Il me regarde intensément, ses yeux plongent dans les miens, me troublant

........ Qu’as-tu fait ?

J’essaie de sourire, mon pouls s’emballe, comment lui présenter ça ? Je n’ai rien préparer. Je me jette d’un coup.

...... Ce que j’ai à te dire est difficile alors laisse-moi parler.

..... Je t’écoute !

....... Voilà, manou et Anne-Marie m’ont parlé d’un gros problème concernant Alexandre. Et heu ........ Je voulais m’assurer que c’était vrai.

....... Mélissandre, ne fais pas de détour, que se passe-t-il avec mon cousin ?

Et d’un bloc je raconte tout, les appels téléphoniques à manou et Anne-Marie, le repas de ce midi et les aveux de Christine

Au fur et à mesure le regard de Matthieu fonce, il devient blême, et d’une voix ou perce la rage.
....... Quel crédit pouvons-nous porter aux dires de mademoiselle Frontasky, et quelle défense aura Alexandre, c’est une parole contre une autre, ne dira-t-elle pas que tu mens ?

Je me lève et dans mon sac, je prends le dictaphone ....... Monsieur Jorelle, je suis bien plus rusée qu’elle !

J’enclenche la lecture et tends l’appareil à Mathieu. Il écoute jusqu’au bout. Je le laisse et demande à madame Breton de servir un nouveau verre à son patron. Je pense qu’il va en avoir besoin

En fin de bande, il repose le dictaphone à côté de lui ....... Dans quel but ?

...... De se faire épouser ! Sachant que Patrick demanderait à son fils de réparer

...... Va-t-on un jour, être tranquille ?

Il parle la voix éteinte, dans un état de lassitude et d’incompréhension complète

........... Quand tout va bien d’un côté, il faut que ça merde de l’autre. Est-ce qu’une fois, une seule fois, il n’y aura pas de problème ? Les bonnes femmes ne sont bonnes qu’à se bouffer la laine sur le dos. Dorénavant je n’embaucherai que des hommes, au moins je serais tranquille !

Il pousse un soupir ....... Allons diner !

Le repas est triste, je n’ose pas parler et le laisse dans ses pensées. Dès la dernière bouchée avalée, il se lève, vient effleurer mes lèvres et s’enferme dans son bureau. Je le soupçonne de téléphoner à son cousin.
Après une rapide douche, je prends mon livre prénatal que je ne me lasse pas de lire et vais me coucher

Matthieu n’est pas long à me rejoindre.

Je pose mon bouquin, et me colle à mon mari, sans aucune arrière-pensée, juste être près de lui, sentir son odeur de gel douche, sentir sa peau contre ma joue. Je m’endors rapidement.

En arrivant, au bureau je téléphone tout de suite à Ghyslaine chez elle. Elle ne travaille pas ce jeudi.

En quelques mots je lui raconte la soirée d’hier avec Matthieu, les explications et son dégoût pour ce nouveau problème. Une bonne heure après je raccroche et fais le courrier que mon mari de PDG m’a laissé.
Je n’en ai pas pour une heure, je lui porte le parapheur.
........ Darling, mangeons ensemble ce midi, j’ai contacté Alexandre.

.......... D’accord oui. Lui as-tu parlé ?

...... Oui sans lui dire qu’un enregistrement existait, je veux les deux versions. Ensuite j’aviserai

....... Mais ton cousin n’est pas responsable.

....... Il est responsable de s’être accoquiné avec une traine savate.

Son ton sec me remet en place, je quitte son bureau en colère. Il n’a pas à s’en prendre à moi. Quand j’ai mis Christine en garde, ils ont tous été contre moi, alors qu’ils ne viennent pas m’attaquer encore une fois.

Je téléphone à Lise pour lui dire que je mange avec Matthieu.

.... T’inquiète ma Méli, je mangerai avec les filles. Bon appétit, passe le bonjour à ton mari

... Ok, ça marche ma Lison, je viendrai pour le café, promis

Matthieu vient me chercher, je vois à son air sombre que tout ne va pas être rose, il m’entraine à l’ascenseur, nous descendons au parking et montons en voiture. Je ne pose pas de questions. Il accède à un parking souterrain. Nous sommes au Palais Royal.
Nous remontons en surface, main dans la main. Mon mari me guide vers un grand restaurant. Un type nous ouvre

.... J’ai réservé au nom de Jorelle

...... Si vous voulez bien me suivre

Le même type nous conduit à une table, tire une chaise pour que je prenne place. Mon mari se met à côté de moi. En face une seule assiette.

Alexandre un grand sourire aux lèvres vient se joindre à nous.
....... Bonjour belle cousine.

Il me fait la bise, embrasse son cousin et s’assoit. Matthieu commande l’apéritif et un jus de fruits.

Alexandre ... Ce n’est pas une belle garce ?

Matthieu sourit en hochant la tête ...... Heureusement que mon épouse à la tête bien vissée sur les épaules. De plus madame Germain est aussi témoin.

........ Tu as l’enregistrement ?

Matthieu fouille dans la poche intérieure de sa veste et sort le dictaphone, il appuie sur lecture. Nos voix se font entendre.

Le serveur nous amène les menus, connaissant le discours, je me plonge dans sa lecture et fais mon choix.

Tout en mangeant, les deux cousins mettent au point un stratagème, et même si je n’écoute qu’à moitié, occupée à savourer mon veau sauce forestière, le peu que je capte me déconcerte.

Sur le trottoir nous faisons la bise à Alexandre, qui part de son côté, nous rejoignons la voiture au parking et rentrons au travail. En chemin Matthieu me recommande de ne parler de rien à personne.
....... A qui veux-tu que j’en parle ?

....... Ta cousine par exemple !

....... Mais non, elle n’est même pas au courant du début de l’histoire.

....... Parfait, et je te garantis, que Frontasky a très mal joué, sur ce coup-là !

Son ton de colère me fait froid dans le dos. Je ne réponds pas. En arrivant je vais directement au standard boire un café avec Lise. Heureuse de me voir, elle me saute au cou.

...... Ah ma Méli, je pensais ne pas te voir aujourd’hui.

...... Désolée, j’avais du boulot ce matin, et à midi Matthieu voulait qu’on déjeune ensemble.

....... Pas grave je comprends.

Nous buvons un café tout en parlant et riant de tout et de rien. J’essaie de me détendre. Je reste un bon quart d’heure avec ma cousine et regagne mon bureau.

Vendredi, Ghyslaine est au travail, nous mangeons ensemble, vite fait je lui explique le plan machiavélique des deux cousins.

....... Il y aura ta grand-mère ?

...... Ah oui bien sûr.

...... Donc monsieur Duval sera là.

Je souris ....... Bah oui !

Elle éclate de rire ........ Oh, comme j’aimerais être une petite souris.

Je ris aussi, et lui promets de tout lui raconter.

Il est à peine seize heures, quand Matthieu me demande de me préparer, nous allons directement à Neuilly.

Au salon Maryse est en compagnie d’une jeune femme, la quarantaine. Les deux femmes papotent plaisamment.
Maryse m’embrasse et me présente ........ Mon petit je vous présente Laurence Billon

Je me tourne vers la jeune femme qui s’est levée et lui serre la main ... Bonjour madame Billon

.... Bonjour madame Jorelle, mais je vous en prie appelez-moi Laurence

Je lui souris et m’assois. Matthieu est allé directement dans son bureau poser sa mallette. Il entre dans le salon, je le sens d’humeur moyenne. Après un signe de tête à Laurence, il embrasse sa tante et vient prendre place à mes côtés

.... J’ai invité mes beaux-parents pour demain midi

.... Excellente idée.

.... Vous demanderez une paëlla en cuisine

La tante narquoise ... Et pourquoi une paëlla ?

... Parce que je n’ai pas envie d’une choucroute, tout simplement

La tante me demande si c’est mon souhait

Je ris .... Maryse, ce que veut mon mari, me convient parfaitement

Matthieu enlace mes épaules et m’attire à lui .... Madame Jorelle, je m’en vois ravi. Si ce n’est que ce n’est pas toujours la vérité !

Je tourne ma tête vers lui ... Comment peux-tu être autant de mauvaise foi ?

Il rit, de ce rire que j’adore .... Mettriez-vous mes dires en doute madame Jorelle ?

Je dépose un léger baiser sur ses lèvres .... Monsieur Jorelle, jamais de la vie, oh quelle vilaine pensée.

... Veux-tu un café ?

... Non merci.

Il fait un geste à Catherine .... Servez-moi un café s’il vous plait

... Oui monsieur

Matthieu se tourne vers la dame de compagnie, qui n’a pas dit un mot, les mains croisées sur ses genoux, droite comme un I, je la sens raide et mal à l’aise

...... Qu’avez-vous fait cette semaine ?

D’une voix claire elle explique .... Lundi nous avons fait plus ample connaissance avec madame la comtesse, mardi nous avons joué au bridge, puis j’ai appris à madame la comtesse à jouer au rami. Mercredi nous sommes sorties en ville, Georges nous a conduit, jeudi nous sommes allées au cercle de madame et cet après-midi nous sommes restées ici.

...... Bien ! Si ma tante s’en satisfait, c’est parfait.

Catherine amène un café à son patron, comme à son habitude il l’avale en deux gorgées et se lève

...... Ma tante, excusez-moi, je vous ai amené votre nièce, mais j’ai un dossier à finir

...... Oui va mon grand.

Il effleure mes lèvres et sort.

Maryse me demande s’il a des soucis,

.... Pas que je sache. Il est fatigué je pense.

...... Prendrez-vous quelques jours ?

Je hausse les épaules dans un signe de méconnaissance. ....... Il ne m’a parlé de rien.

..... Comment vous sentez-vous ?

Je souris ... Elle bouge bien, le gynécologue comme Alexandre, me disent que tout va bien, elle a grossi.

....... Plus que trois mois pour voir ce petit trésor, il me tarde tant.

Je ris ...... Oh moi aussi, je crois que ce sera une coquine pleine de vie

.... Neuilly va reprendre un peu de vie, d’entendre un enfant babiller sera un grand bonheur.

... Je m’en doute, mais n’allez pas la choyer outrageusement.

La tante rit, ses yeux pleins de malice .... Un tel trésor à droit à tous les bonheurs.

... Hum, je ne suis pas sûre que Matthieu vous laisse faire.

... Je ferais bien comme j’en ai envie, tant que cela ne vous froisse pas

... Mais non Maryse, je sais que vous ferez avec votre grande générosité, et votre gentillesse.

La tante, j’en suis sûre à rosit légèrement. Je demande si manou sera là demain

.... Oui bien sûr, Patrick et Odette, tiennent à venir se ressourcer au domaine pour mon plus grand plaisir

... Super alors

Nous papotons pendant deux bonnes heures dans la joie et la complicité. J’aime beaucoup la tante, c’est une femme charmante, généreuse et toujours bienveillante. Sa douceur met le calme entre l’impétuosité des deux cousins

Matthieu fait servir l’apéritif et deux jus de fruits. Un pour Laurence et un pour moi. Il allonge ses jambes et croisent ses pieds l’un sur l’autre. Je sais que dans cette position, il n’est pas dans un calme absolu, j’ai appris à reconnaitre certains signes.
Il boit une gorgée de son whisky et attaque sa tante d’un ton qui dément la douceur ....... Demain je me dois de discuter avec mon beau-père et sa compagne, Patrick et manou seront présents, je vous prierais de garder pour vous toute intervention.

....... Si c’est un échange personnel, alors fais-le dans le bureau et non en public.

...... Disons, qu’il est préférable que vous soyez tous à l’écoute !

...... Vas-tu te quereller avec Bernard ?

...... Pas le moins du monde, juste mettre certaines choses au point

....... Lesquelles ?

...... Vous le saurez assez tôt ! Passons-nous à table ?

...... Il est à peine vingt heures

...... J’ai du travail madame ! Si je suis là de bonne heure, il n’empêche que les dossiers ne se font pas tout seuls

La tante se lève et malicieuse ...... C’est évident !

Pendant le repas, je remarque la prévenance de Laurence auprès de la tante. Elle la sert, lui remplit son verre, est attentive à ses moindres gestes. Hum j’ai bien peur qu’en fin de compte la tante s’encroute un peu. Je vais essayer d’en parler à Matthieu.

Maryse détend l’atmosphère en papotant légèrement, je ris à plusieurs reprises, et surprends Mathieu à rire aussi. Il se détend et lance quelques boutades à sa tante.

Il reste avec nous au salon, sa tante en profite pour demander s’il ira voir Kevin.

...... J’ai envoyé Sophie une semaine avec son frère

..... Oui j’ai appris, la pauvre petite a dû se faire une joie. Et vous-même, ne prendrez-vous pas quelques jours, l’air de la montagne ferait du bien à ton épouse

........ Je demanderai avis auprès d’Alexandre, à savoir si la voiture ne fatiguera pas trop madame Jorelle, auquel cas, nous irons effectivement voir Kevin quelques jours

... Et sinon ?

...... Et sinon, je laisserai Mélissandre aux bons soins de sa grand-mère, je ne peux faire l’impasse et vous le savez

J’écoute un peu déroutée, qu’il ne m’ait pas parlé de ce futur voyage, je me tourne vers lui et demande un peu sèchement

.... Et je suis sensée le savoir comment ?

... Je voulais t’en parler, mais comme à son habitude ma tante, met les pieds dans le plat avant l’heure du repas !

Maryse s’excuse en souriant .... Que ne parles-tu pas avant le repas dans ce cas-là ?

...... J’ai plus urgent à régler !

J’ai envie de sourire, Laurence du regard, va de la tante au neveu. J’essaie d’imaginer ses pensées, tout comme moi au début lorsqu’ils parlaient de cette même manière sans que, celui qui n’est pas dans ce milieu, ne puisse comprendre.

Je demande la permission, pour la forme de monter me reposer.

...... Va darling, je te rejoins rapidement.

J’embrasse la tante lui souhaitant une bonne soirée.

Tout en me déshabillant, et sous la douche, je pense à demain. La foudre va tomber sur certaines têtes. Je me couche et bouquine en essayant d’attendre mon mari, mais il tarde et je finis par m’endormir.

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6 février 2002

Février

Janvier se termine. Mon ventre s’arrondi de plus en plus, me tirant dans le bas des reins. Je ne dis rien, j’ai trop peur qu’Alexandre me mette en arrêt maladie, ou que Matthieu m’oblige à rester à la maison.

Les cachets prescrits par Alexandre font leur effet. Je n’ai pas piqué de colère depuis un mois.

Ghyslaine n’est pas revenu au travail, elle a prévenu Matthieu, elle est en arrêt pour un mois, Lise se plait et a pris ses fonctions avec beaucoup de sérieux menant les filles avec une gentillesse et une diplomatie que je ne lui connais pas. Toutes à l’unanimité ont dit à Matthieu après interrogation que la dirigeante était plaisante et courtoise.

Ghyslaine a essayé de la faire parler, de moi, de Christine. Avec beaucoup de tact Lise a répondu
....... Tu sais, j’essaie de mener ma vie du mieux que je peux, et les autres pas que je m’en moque, mais je ne m’occupe pas de leur vie. Ça les regarde, et je ne veux pas qu’on se mêle de la mienne. Tu vois, des fois Mélissandre me le disait et je m’aperçois qu’elle avait raison. Chacun sa vie.

Ghyslaine me l’avait répété en riant.

Depuis mon explication avec Matthieu, je fais très attention à ne pas monter en pression. Notre entente est redevenue celle qu’elle aurait toujours dû être

Mon mari me fait l’amour avec délicatesse et élégance. Des crises de fous rires, remplacent les colères.

Ce week-end nous restons à l’appartement. Nous allons nous promener au jardin des plantes. Samedi soir Matthieu termine un travail, il me rejoint devant la télé. Dimanche nous ne sortons pas, à cause de cette pluie qui tape sur les carreaux.

Ce matin, je vais passer ma deuxième échographie, Matthieu a demandé un rendez-vous à dix-heures. Il vient me chercher à l’appartement, et m’emmène à la clinique de Neuilly. En chemin il bavarde, heureux.

...... Dis-moi darling, j’ai vu avec Patrick et ta grand-mère, pour libérer monsieur Germain, il viendra faire un devis et serait prêt à commencer les travaux de la chambre, dès notre feu vert.

... Je suis à mon cinquième mois, n’est-ce pas trop tôt ?

... Veux-tu attendre encore un mois ?

... Bah comme Pâques est le trente et un mars, on pourrait faire ça juste après.

... Si tu veux, attendons un bon mois.

Il se gare sur le parking, et main dans la main, nous allons à l’accueil. Comme la première fois, la fille valide notre rendez-vous et nous fait patienter dans la petite salle d’attente.

C’est un monsieur qui vient nous chercher, il me fait relever ma robe et me demande de m’allonger. Tout comme son collègue il badigeonne mon ventre rond, de cette espèce de gel. Tout en baladant son appareil il regarde l’écran

... Connaissez-vous le sexe ?

... Heu une petite fille ?

... Oui une belle petite fille. Elle a bien grossi, c’est bien. La première échographie montrait un petit bébé

... Tout est normal ?

Il tourne légèrement son écran vers nous, et en pointant de son doigt, nous explique que les poumons se développent bien, le cœur bat à un rythme régulier, il nous montre ses pieds en l’air, et son pouce dans sa bouche. Des larmes de bonheur roulent sur mes joues

... Oh c’est merveilleux.

Je relève un peu la tête pour voir Matthieu, il ne quitte pas l’écran des yeux.

... Elle est belle hein ?

... Oui darling, elle est belle. 

Le type me tend du papier absorbant, Matthieu m’aide à m’essuyer et à descendre de la table.

... Tenez, le médecin va vous recevoir.

Je tends la main et prends l’enveloppe, avec les photos de notre bébé dedans.

Le médecin, m’ausculte délicatement, je me rhabille

... Tout est parfait, votre enfant a pris du poids, il se développe bien. Je vous revois dans trois mois.

... Merci docteur.

Matthieu reprend les échographies, nous sortons dans ce froid humide.

... Veux-tu déjeuner dehors ?

... Oui, si tu as le temps.

.... Pour toi, j’ai toujours le temps.

Il m’emmène dans un grand restaurant, comme au temps où nous n’étions pas encore mariés. Il y a bien longtemps que nous ne sommes sortis que tous les deux.

Je me régale, d’être ici avec mon mari en amoureux, je me régale des mets délicats et délicieux. Matthieu me fait une conversation plaisante, qui me fait sourire, et même rire.  Il me dépose à l’appartement et reste avec moi, tout en étudiant un dossier, pendant que je parcours mon exposé à envoyer avant la semaine prochaine. La soirée est calme, nous devisons tranquillement devant la télé sans vraiment suivre cette intrigue policière.

Mon mari vient se coucher, sentant bon le gel douche, une douce chaleur monte en moi.

Nous arrivons ensemble au travail à pratiquement midi, l’un comme l’autre, avions besoin de dormir, de nous reposer de cette nuit intense.

Je vais embrasser Lise et lui demande si elle mange avec moi.

Nous allons au chinois, elle me pose des questions sur ma grossesse, comment je me sens. Je lui dis que je vais mieux, que je suis moins inquiète et plus calme. Elle me sourit gentiment

...... Bon dis, quand est-ce qu’on fait mon inscription pour mon bac, on est quand même presque fin février.

....... C’est vrai, nous n’en avons pas reparler. Que dit ton père ?

...... Bah rien, il attend que je me décide.

..... Pour le passer en juin, il va falloir que tu bûches sacrément, tu ne veux pas attendre septembre ?

....... Je ne sais pas, qu’est-ce que tu en penses ?

... Je pense que tu pourrais commencer à réviser et attendre septembre pour être sûre et prête

 .... Je ne vais pas savoir ce qu’il faut réviser

... Je t’amènerai mes cours.

Elle me sourit ... Merci Méli

... De rien ma Lison. Ton père est toujours ok pour t’aider ?

... Il me paie l’inscription et les bouquins, et après je me débrouille.

.... D’accord. Et puis au standard, tu as peut-être le temps d’étudier un peu

.... Il y a du travail, mais un peu oui je pourrais.
... Alors je t’apporte ça rapidement, et je te guiderai si tu le souhaites

... Oui bien sûr, j’accepte ton aide avec plaisir.

Je ris ... Bon les maths faudra voir avec tonton, je ne suis pas trop fortiche

Elle sourit ... Oui papa est prêt à m’aider.

Je paie, nous repartons, Lise fait des plans sur la comète.

Une bonne partie du mois de janvier avec Patrick, à son retour de congés, nous avons étudiés les rapports des responsables de bureaux puis des directeurs d’étages. Entre-autre Gérard Thibault et Alain Bresson

Nous avons noté par cases sur dix. Certaines auront comme Nadine Lemoine ou Isabelle Nonce, cinquante sur cinquante, ce qui revient à dire qu’elles toucheront salaire double. D’autre qui auront trente, n’auront que 50% de prime. Je trouve cette cote mal taillée mais je ne dis rien, nous avons enfin bouclé la totalité des employés, siège et agences

Je quitte un peu après seize heures, je vais directement me reposer. Je me sens les jambes lourdes et un léger mal de tête se profile.

Matthieu rentre pour diner. Nous allons nous délasser devant une pièce de théâtre diffusée à la télé.

Nous partons pour Neuilly dans la matinée. Matthieu a décidé depuis ma dernière crise que nous n’irions qu’une semaine sur deux, l’autre semaine, nous restons à l’appartement, ou dans ma famille selon les invitations

Maryse en compagnie de manou et Patrick nous reçoit comme à son habitude avec son grand sourire et ses gentilles paroles de bienvenue.

Patrick sert l’apéritif et demande un jus de fruit. Catherine s’empresse de m’apporter un grand verre d’orangeade bien fraiche. Je la remercie d’un gentil sourire.
C’est dommage, je n’ai jamais pris le temps et jamais eu l’occasion de parler avec cette jeune femme.

Un léger bruit me fait tourner la tête, Alexandre en décontracté, jeans et sweat s’avance. Après ses hommages à manou et sa tante, il vient m’embrasser et s’assoit sur le canapé nous faisant face. Son père lui tend un verre.

Je lui trouve un air sombre. Manou et Maryse échange sur un sujet qui me fait sourire. Broderie et tricot layette. Les hommes ne parlent pas, je sens comme une tension dans l’air. Je sirote mon verre tranquillement.

Matthieu .... Passons-nous à table ma tante ?

Maryse ... Oui bien sûr.

Nous nous levons tous en concert et nous dirigeons vers la salle à manger. Le repas est tranquille vu d’extérieur, mais pour moi, il est pesant, malgré que la tante et ma grand-mère fassent tout pour entretenir un semblant de conversation.
Dès le repas fini, Matthieu m’entraine pour une petite promenade au travers du parc, Alexandre va dans le bureau téléphoner quant aux trois anciens ils vont au salon télé

Matthieu m’aide à enfiler mon manteau et prend ma main, nous descendons les escaliers et allons tranquillement jusqu’au kiosque. Je n’ose rien demander et ne brise pas le silence qui s’est installé.

Matthieu s’assoit, je me colle contre lui, il passe son bras autour de mes épaules et m’attire davantage. Alexandre nous rejoint il s’assoit sur le banc faisant l’arrondi, face à nous

... Alors qu’en dis-tu ?

Mon mari reste quelques secondes, songeur et d’une voix détaché lâche .... Que veux-tu que j’en dise ?

... Est-ce vraiment utile ?

Je vais de l’un à l’autre du regard, ne sachant pas de quoi ils parlent.

Mon mari sourit ....... Utile ou pas, nous serions assurés que tout va bien. Après tout quand nous sommes absents, nous ne savons pas ce qui se passe.

Alexandre, ce sourire ironique au bord des lèvres .... Crois-tu que tu aurais des comptes rendus détaillés ?

Matthieu rit ...... Des comptes-rendus détaillés, non, mais elle prend de l’âge, il serait bien que quelqu’un soit à ses côtés.

...... Le personnel n’est pas suffisant ?

Mon mari sans se départir de ce ton narquois ...... En quoi cela peut te déranger, dis-moi ?

...... Tu vas la rémunérer à jouer au bridge ?

Je commence à comprendre, ils parlent de Maryse, et d’une futur dame de compagnie. A première vue Alexandre n’est pas d’accord.

Le rire de Matthieu me tire de mes pensées ....... Ne vois pas les choses ainsi Alexandre. Pour ma part, une fois ma fille née je n’aurais pas entre mes beaux-parents et manou le temps de m’attarder ici, et tu viens si rarement, qu’il faut te supplier pour que tu nous fasses grâce de ta présence.

.... Sache qu’un week-end par mois je suis d’abstreinte

... Ne t’en reste-t-il pas trois mon cher cousin ?

Alexandre sourit ...... Bien sûr, mais honnêtement Neuilly devient un peu déprimant.

...... Que veux-tu chacun à sa vie, nous ne pouvons pas chaque week-end remplir le domaine avec des invités

....... Ou sont les soirées de notre enfance ?

....... Les temps changent, et je n’interdis pas d’organiser des soirées

Alexandre éclate de rire .... Les barons et les comtesses sont un peu antiques

Matthieu rit aussi, je suis obligée de sourire .... N’as-tu pas d’amis ?

...... Aucun que je n’ai envie de faire rentrer dans notre intimité

..... Donc en quoi ça te dérange ? 

..... Rien en soi, mais le week-end, ou lors de nos visites, serons-nous obligés de l’avoir dans nos conversations ?

...... Ne t’inquiète pas pour ça, elle sera au courant avant que tu respires. Maryse se fera une joie de lui détailler chacun de nous

Alexandre sourit .... Je n’en doute pas.

... Faisons un essai, qu’est-ce qui nous engage ?

En soupirant Alexandre fini par donner un accord mi-figue mi-raisin. .... Alors vois ! Comment comptes-tu-t-y prendre ?

.... Je pense faire appel à une agence spécialisée.

... Alors tu n’auras qu’une seule présentation, sans avoir le choix !

Matthieu soucieux regarde son cousin ... Aurais-tu une autre idée ? Une annonce dans le journal et tout et n’importe quoi va venir se présenter.

...... Alors demande plusieurs personnes pour avoir le choix, une n’est pas dit qu’elle nous plaise

...... Doit-elle nous plaire, ou satisfaire Maryse ?

..... Disons, que oui elle devra satisfaire les exigences de Maryse, mais aussi nous convenir. Prendras-tu une ancienne, une jeune ?

.... Je pensais une entre deux-âges pour être assez dynamique, et sortir la tante, la balader, l’emmener faire les boutiques, que sais-je ! Voyons la quarantaine

.... Bien tu t’en occupe quand ?

... Rapidement, ça n’a que trop trainé. Mardi serais-tu libre ? Ou pourrais-tu te libérer ?

... Mardi est parfait, le lundi est généralement surchargé, et le mercredi j’ai bon nombre de bambins.

... Disons mardi, sinon samedi prochain !

.... Alors samedi, je serais davantage libre de ma journée, mon cabinet étant fermé

Matthieu se lève ...... Parfait samedi nous serons là ! Je téléphonerai dans la semaine, donnons-nous le nombre de quatre, il y en aura bien une qui nous satisfera !

Alexandre se lève à son tour, Matthieu me tend la main, je m’extirpe du banc ou je commençais à ne pas avoir chaud, sous mon manteau.

Nous allons à petits pas jusqu’au domaine. En rentrant Matthieu m’oblige à monter me reposer, je ne dis rien et vais directement m’allonger sous la couette, après avoir ôté ma robe

Matthieu vient me chercher pour goûter, il est pratiquement dix-sept heures. J’enfile ma robe et vais me coiffer. Nous descendons au salon ou je sais retrouver Maryse, manou et son mari. Alexandre est parti, dès que nous sommes rentrés de balade.

Le reste du week-end est bien calme, presque je m’ennuierai malgré la présence de ma grand-mère. Alexandre a raison, cette demeure manque de jeunesse.

Nous rentrons dimanche soir, peu après le repas

Avec Matthieu le climat est revenu au beau fixe, je prends toujours mes cachets mais en moindre quantité. Le matin j’en prends un seul, et le soir pour être sûre de dormir j’ai gardé les deux, j’ai supprimé ceux de la journée

Le midi je mange avec Lise, notre entente est réelle. Ma cousine a vraiment changé. Tantôt, elle est rieuse et pleine d’humour, tantôt elle est très réfléchie pour des sujets sérieux. Je ne l’entends plus avec ce ton moqueur déboiser sur untel ou untelle, et même si je la dirige sur une quelconque raillerie sur une collègue, gentiment elle me répond
.... Tu sais Méli, elle n’a peut-être pas les moyens d’aller chez le coiffeur

Ou comme l’autre jour, quand je lui ai dit que Marinette une de ses collègues pourrait au moins s’habiller un peu plus classe.... Je ne trouve pas qu’elle soit mal attifée, elle est peut-être moins coquette que toi.

J’avais souris ....... Oui tu as raison, je n’ai pas le droit de juger

..... Non ce n’est pas un jugement, tu constates c’est ton droit.

J’étais restée pantoise. De ne plus reconnaitre ma cousine, mais tellement heureuse de ne pas avoir retrouver l’ancienne

En fait j’ai retrouvé mon ancienne, ancienne cousine, celle qui était mon double, celle qui était la sœur avec laquelle je partageais tout.
Ce midi en souriant je lui demande si elle a des nouvelles du bel Alexandre.

... Je l’ai vu hier après-midi, il est venu me chercher, nous sommes allés prendre un pot et il m’a raccompagné pour le repas

... Il n’est pas resté à diner avec vous ?

... Heu non, maman lui a proposé mais il a dit avoir à faire et c’était dimanche

... Et alors ?

... J’évite de sortir le dimanche soir pour être en forme au travail le lundi

... D’accord, et les amours ?

Elle éclate de rire ... Doucement, ça avance doucement, il est sur la réserve et moi aussi, je ne veux rien bousculer

... Il te plait ?

... Ah mais pire, je crois que je suis amoureuse.

Je regarde longuement ma cousine avant d’attaquer mon ile flottante ...... Lise, sois sûre de toi, je ne pense pas qu’Alexandre accusera un troisième échec en peu de temps.

Lise à son tour me regarde comme si j’avais un troisième œil, je finis par rire et lui demande si j’ai du noir sur le bout du nez. Elle revient sur terre

... Comment on sait qu’on est amoureuse Méli ?

... Heu bah c’est un truc qui nous prend toute entière, je ne sais pas comment t’expliquer

... Et moi je peux te dire ?

.. Si tu veux.

... Quand je sais que je vais le voir, je suis comment te dire ... Heu, je suis

Elle semble chercher ses mots, je la laisse parler.

Elle sourit ... Je suis nerveuse, mais pas nerveuse en colère, non je suis comme dans un autre moi. Je me prépare fébrile, j’ai le cœur qui bat, est-ce que ça va lui plaire, est-ce que je suis assez belle ?

Je souris ... Lise tu es jolie et tu le sais, tu as un magnifique sourire, bien sûre que tu es belle

Elle pique son fard et me remercie.

.... Comment un mec comme Alexandre peut se plaire en ma compagnie ? Je ne suis pas instruite

….. Lise, tu n’es pas instruite, mais tu es intelligente, tu as la verve légère, tu fais dans l’humour taquin, pas dans l’ironie. Tu t’intègres facilement dans une conversation. Tout ça, c’est ton charme.

... D’accord Méli, mais il ne peut pas être amoureux de moi

... Alors là je ne peux pas te dire, je n’en sais rien. Et toi ? 

Elle rougit ... Oui Méli, je suis amoureuse, pas comme tous les flirts que j’ai eus non. Quand je suis avec lui, j’ai envie de pleurer de bonheur, j’ai envie de me serrer contre lui. J’ai envie de l’entendre rire, j’aime sa voix, quand il m’explique un truc, quand il prend ma main, j’ai mon cœur qui bat vite. Tu vas me trouver bête hein.

Je ris ... Non Elise, c’est bien l’amour

 

Ses yeux s’assombrissent ... Je sais Méli, je suis consciente que ça ne durera pas. Je sais qu’il n’est pas pour moi.

... Pourquoi dis-tu ça ?

... Méli, nous ne sommes pas sur un pied d’égalité.

... Arrête avec ça. Dès le début il a su que tu étais manutentionnaire, il te savait en dépression, est-ce pour ça qu’il t’a tourné le dos ?

Lise se trouble ... Non bien sûr, mais je ne suis que la cousine de son cousin

Je la regarde sans comprendre et pose la question fatidique .... Vous n’êtes qu’amis ? Même pas un petit baiser ?

Tristement Lise me fait non de la tête. J’essaie de la réconforter

... Lise, il avait une folle, une liaison qui a duré un peu plus de trois ans, il a tenté avec Christine parce que son calme le changeait de la folle, mais il est vite retombé sur terre. Il est avec toi, il prend son temps, il doit vouloir être sûr de lui, de toi. Continue à être naturelle, enjouée et loquace, ne lui montre pas un visage fermé. Il aime rire, fais le rire, il aime l’humour, joues-en

... Oui d’accord

... Ne surjoues pas Lison, il s’en apercevrait vite. Reste-toi, telle que tu es, l’adorable Lise qu’on redécouvre

Elle sourit ....... Merci Méli

Je souris à mon tour ... De rien ma chérie. Je te souhaite de le conquérir et d’être heureuse.

.... Non Méli, ce n’est pas à moi de le conquérir, c’est à lui.

J’éclate de rire ... Alors il n’aura pas gros effort à faire

Elle rit ... Tu es bête

Nous nous levons, avec du mal je m’extirpe de ma chaise, mon ventre est bien rond, et j’ai souvent mal dans les reins, mais je tais ma douleur. J’ai trop peur que Matthieu me cantonne à l’appartement.

Lise passe son bras sous le mien, et règle son pas au mien.
.... Méli ?

.... Oui ?

..... Comment tu fais avec Matthieu quand il se met en colère ?

Je tourne la tête vers ma cousine, qui change d’un coup de couleur ....... Non excuse-moi Méli, je ne voulais pas être indiscrète.

Je souris .... Mais non ce n’est pas de l’indiscrétion et pour te répondre, bah tout dépend des circonstances, des fois je remballe ma rage pour ne pas envenimer

Elle fait oui de la tête. ..... J’ai vu Alexandre, et il a des fois les mêmes réactions que ton mari.

..... Alexandre de par son métier est plus conciliant, mais ils ne se mettent pas en colère sans raison ma Lison.

.... Oui d’accord.

Nous rentrons, Lise reste songeuse. Je vois bien qu’elle se pose beaucoup de questions, je n’insiste pas. C’est à elle de découvrir les diverses facettes d’Alexandre

Nous rentrons tranquillement, nous nous faisons la bise devant la porte du standard.

Sur mon bureau un magnifique bouquet de 9 roses rouges. Mes larmes montent directement. Des larmes d’amour, de bonheur. Je me rappelle le bouquet de l’an passé.

En rentrant je me fais couler un bain parfumé, je me prélasse, prends soin de moi et m’habille de cette belle robe d’intérieur que Matthieu m’a offert dernièrement.
A l’heure de son arrivée, je lui sers un whisky et l’emmène dans la chambre pour le remercier de toutes mes forces. Il rit quand je le pousse vers le lit. Je desserre sa cravate et déboutonne sa chemise.

Nous dinerons seuls, madame Breton a quitté son service depuis une heure.

En rentrant de déjeuner, je vais boire un café avec Lise, et retourne dans mon bureau silencieux. Au standard, les téléphones n’arrêtent pas de sonner, nous ne pouvons pas discuter tranquillement.

J’appelle mon amie toujours en arrêt maladie

... Oh ma belle, c’est gentil de m’appeler

... Comment tu vas ?

... Bien mieux, je pense reprendre lundi, avec un mi-temps, ensuite je verrais si je peux reprendre à plein temps. Le bébé grossi bien, et je n’ai pas de problème particulier.

... D’ac ma chérie

... Et toi ?

... J’ai un gros bidon, sinon ça va

... Et le standard, elle s’en sort la cousine ?

Je la rassure, nous parlons un peu de Lise, de ce calme et cette maturité qu’elle a gagnée. Mon oncle étant toujours un peu inflexible, dans le sens ou le samedi elle doit aider sa mère au ménage avant de sortir, être présente aux heures des repas.

Ghyslaine me demande si j’ai des nouvelles de Christine, je lui avoue que non, que je ne suis même pas allée voir si elle allait bien. Ghyslaine m’apprend qu’elle ne va pas tarder à avoir un type dans sa vie

... Ah bon, mais comment tu sais ça ?

Ghyslaine rit .... Je t’expliquerai, et je te montrerai que j’avais raison

... Sur quoi ?

... Qu’en lui présentant un mec assez bien placé, bah elle plongerait à pieds joints

... Bon écoute, maintenant tu me dis tout, sinon je ne te cause plus jamais

Ghyslaine éclate de rire, je l’entends essayer de reprendre son souffle

... Bon ne t’énerve pas ! Un dimanche Alexandre était chez son père et ta grand-mère et ton père et ta belle-mère sont allés boire le café avec Christine.

Je la coupe directe ... Elle a repris avec Alexandre ?

.... Non, ne t’inquiète pas. Monsieur Duval nous avait conviés pour parler travaux, tu sais ils veulent faire des dressings dans les chambres.

... Ah non je n’étais pas au courant.

... Donc, pour les dressings, Marc leur a présenté le parrain du petit qui est menuisier, et qui fera du meilleur boulot que Marc, c’est d’ailleurs lui qui a poussé Marc à se mettre à son compte.

... Pourquoi ?

... Pourquoi quoi ?

... Pourquoi ce n’est pas Marc qui fait les travaux ?

... Marc est minutieux et touche à tout, mais la maison Duval est de qualité supérieure, il leur faut des vrais corps de métier.
... Ah oui d’accord, et donc ?

........ Didier a commencé à parler travaux avec monsieur Duval, ils sont allés dans les chambres prendre des côtes. Nous étions tous dans le salon. Duval et Didier sont revenus avec nous, ta grand-mère avait un catalogue pour montrer le genre qu’elle aimerait, bref l’après-midi est passé en discussions de travaux. Un moment donné Marc a dit qu’on allait partir, et tu connais ta grand-mère, elle a gardé tout le monde le soir pour diner. Christine direct s’est assise à côté de Didier

Je la coupe ...... Et Alexandre ?

...... Non Alexandre est reparti dans l’après-midi

...... Ah d’accord, et donc ?

...... Et donc, bah Didier a dit qu’il reviendrait dans la semaine. Du coup Marc est allé avec lui, et devine, bah Christine était tous les soirs chez ta grand-mère.

...... Non ! Tu déconnes ?

...... Tel que je te le dis.

...... Mais il est libre ce type ?

....... Oui bien sûr. De plus, tu parles elle a vu qu’il avait une BM, qu’il était fringué en marque. Didier à de la tune, il est à son compte, mais en fait il ne bosse pas vraiment, il a cinq ouvriers, il fait juste les devis, il est commercial si tu préfères

....... Gi, si c’est votre ami, préviens-le qu’il ne se fasse pas avoir, le pauvre type !

....... J’en ai parlé à Marc, il m’a dit d’attendre voir comment les choses évolues, dans le sens où elle ne le rencontrera pas ou peu.

... Ouais, mais elle sait y faire avec sa tête de martyr.

Ghyslaine rit .... Je l’attends au tournant, t’inquiète !

...... C’est un truc de dingue, elle compte faire le poireau chez manou ?

....... Alors là je ne peux pas te dire.

...... Quelle garce !

....... Suite au prochain numéro.

...... Ouais, bon sinon, tu fais quoi de tes journées, moi je n’arrive pas à rester à la maison.

.... Téléphone-moi quand tu t’ennuies

Je ris ....... Bah remarque tu reprends lundi on est vendredi

Je raccroche complétement dépitée par ce que je viens d’apprendre. Je laisse un petit mot sur le bureau de Matthieu et décide de rentrer.

Je repasse en boucle la conversation de Ghyslaine.

En rentrant madame Breton me remet trois catalogues aux couvertures glacées. Je la regarde sans comprendre.

....... Monsieur me les a remis ce matin. Je vous sers un rafraichissement ?

... Oui merci.

J’enlève mes chaussures et vais confortablement m’installer sur le canapé. Je sens le bébé bouger dans mon ventre, j’essaie de l’imaginer. Mon cœur fond littéralement de plénitude.
Madame Breton m’amène un grand verre de jus de fruits. Matthieu à acheter un extracteur de jus. De ce fait j’ai toujours de bons jus de fruits frais. 

Je me délecte de ce goût mi âcre, mi sucré de l’ananas. Les magazines posés à mes côtés, j’allume la télé et en prend un que je feuillète rapidement, pour regarder les autres.
Ce sont des brochures concernant, un que des chambres à coucher, l’autre toute une layette et habits jusqu’à trois ans et enfin le dernier un album fait de palettes de couleurs.

Je souris. Evidemment je penche sur du rose. Je verrais bien un joli papier rose tendre avec des motifs par-ci par-là, comme des petits nuages blancs

Je laisse la page ouverte et prends celui des chambres, berceaux, poussettes, landaus.

Les chambres sont toutes plus belles les unes que les autres. Il est difficile de choisir entre tous les modèles.

Je lève la tête, au bruit imperceptible que je viens d’entendre. Dans l’encadrement de la porte, Matthieu un grand sourire aux lèvres, les mains dans les poches, me regarde

... Ah futur papa, madame Breton m’a donné des catalogues

... Oui darling, je suis allé les chercher à la boutique, celui des peintures, c’est Patrick qui me l’a remis

... Ah d’accord

Il vient s’assoir à mes côtés, effleure mes lèvres et me demande ce qui me plairait. Je lui montre la chambre au papier rose, et la chambre avec ce beau lit à voilage.

... Le berceau aura déjà des voiles darling.

.... Oui mais peut-être qu’on peut aussi sur le lit. Le berceau il va jusqu’à quatre mois, pas plus.

Jusqu’au diner, nous choisissons, jusqu’à nous mettre d’accord. Quoique Matthieu me laisse facilement le dernier mot

Madame Breton vient nous prévenir que le diner va être servi. Matthieu me tend la main, avec un peu de mal j’essaie de me relever.

... Tout va bien ?

... Oui ne t’inquiète pas, mais ta fille commence à peser, et elle remue beaucoup.

Il sourit et m’enlace pour me conduire à ma chaise dans la salle à manger. Pendant le diner, il m’apprend que demain nous allons à Neuilly, il a quelques entretiens à faire passer, pour une future dame de compagnie pour sa tante

...... Ah oui, tu en as parlé avec Alexandre.

....... Oui darling, vois-tu ma tante est seule, malgré le personnel. Patrick ne vient plus en semaine, nous n’y allons pas non plus et Alexandre a ses appartements. Les journées sont longues.

...... C’est sûr, déjà moi, je m’ennuie l’après-midi, alors ta tante, la pauvre, des journées entières

...... En mai, j’aimerai que nous restions à Neuilly, je serais rassuré si tu es là-bas, comprends-tu ?

...... Oui bien sûr, mais pas tout mai, et toi ?

...... Je rentrerai à Neuilly le soir, et la journée j’irai au bureau

...... Ah oui d’accord.

...... Sur la fin ta grand-mère a promis de venir aussi, pour être près de toi

Je souris ...... Ah trop cool alors.

Il sourit en me regardant tendrement. Enlacés, il m’emmène me coucher

Nous nous levons en même temps et allons déjeuner. Madame Breton a tout préparé. Aux petits soins, elle m’a fait un jus d’orange frais, des petits pains au lait, un grand verre de lait. Je déjeune de bon appétit, tout en discutant avec Matthieu, il m’apprend, que je ne serais pas seule cet après-midi le temps des entretiens de recrutement, il a convié mes parents. Une question me vient tout de suite à la bouche

...... Christine sera là ?

..... Aucune idée, pourquoi ? 

..... Non pour rien.

Il me regarde les sourcils froncés, je lui fais un grand sourire, et vais me préparer. J’espère qu’elle n’osera pas venir, mais avec elle, faut s’attendre à tout.

Et maintenant que je l’ai introduit chez mes parents, comment m’en débarrasser ? Comment les débarrasser ?

Je sors de la douche, enroulée dans une grande serviette, je vais m’habiller dans le dressing

En voiture Matthieu reste silencieux, je ne parle pas non plus. Il roule au pas, dans la grande allée menant au domaine. Sitôt la voiture en bas des quelques marches Georges descend rapidement pour ouvrir ma portière. Gentiment il me tend la main pour que je m’extirpe de mon siège. Je lui fais un grand sourire en le remerciant.

Matthieu vient me chercher, il donne les clés de la voiture à Georges, enlace mes épaules et me conduit aux escaliers. 

Marjorie nous accueille avec un grand sourire. Matthieu m’aide à enlever mon manteau et le tend à la jeune femme, nous entrons dans le salon, Maryse et Alexandre sont en pleine conversation.

J’embrasse la tante et le cousin, j’attends que Matthieu salue à son tour la veille dame, nous nous asseyons.

Patrick et Manou arrivent. Matthieu sert l’apéritif, il fait signe à Catherine qui m’amène un jus de fruits. En moi je souris, je suis bourrée de vitamines à force de boire des fruits en jus.

Les conversations vont bon train, sur cette future dame de compagnie. Maryse donne quelques recommandations

Matthieu l’interrompt .......  Ma tante, vous assisterez avec Alexandre et moi, aux entretiens, je poserai les questions, nous regarderons soigneusement les références, ensuite et seulement ensuite vous donnerez votre avis. Nous n’allons pas faire passer des interrogatoires et nous n’allons pas y passer la journée.

Mes parents arrivent, une colère sourde s’empare de moi, Christine est avec eux. Mon père s’excuse de ce léger retard, Maryse en bonne maitresse de maison, répond qu’il n’y a aucun tracas.

Matthieu sert un verre de whisky à mon père et un martini à Anne-Marie, d’une voix sèche il demande à Christine ce qu’elle désire boire

De cette petite voix qu’elle prend et qui m’agace au plus haut point .......... Un jus de fruits.

Elle sourit béatement, je la fusille du regard. Manou me sourit tout en étant interrogative. Je n’ai rien suivi des conversations qui se déroulent.

Nous passons à table. Avec empressement Christine se place à côté d’Alexandre. Tout le long du repas, elle essaie d’accaparer le cousin, sans pour autant qu’il s’occupe d’elle. Déjouant avec habilité ses demandes pour avoir du pain ou de l’eau. J’ai envie de sourire, il prend la carafe et la pose à côté de son assiette.

Nos regards se croisent, je le sens agacé, ses yeux expriment la dureté. Je connais ce regard qui en dit long

Nous finissons à peine de manger, Marjorie entre dans la salle à manger.

.... Monsieur Jorelle veuillez m’excuser.

Matthieu tourne la tête ... Oui Marjorie ?

...... Monsieur Jorelle, deux dames viennent d’arriver pour un entretien.

....... Bien, Marjorie, faites-les attendre dans l’antichambre du bureau.

....... Oui Monsieur.

Matthieu regarde sa montre et demande à Catherine de servir le café immédiatement.

...... Oui monsieur

Catherine arrive rapidement avec un plateau et des tasses à café, Jocelyne la suit avec un autre plateau portant le pot de café, le sucrier

Matthieu demande à sa tante ....... Non je le prendrai entre deux

Il sert son cousin et se sert, les deux hommes avale le breuvage bouillant. Matthieu se lève, mécaniquement il arrange son nœud de cravate, effleure mes lèvres ........ A tout à l’heure darling.

Alexandre taquin ........ A tout à l’heure belle cousine number one

Je hausse les épaules en riant ........ A tout à l’heure les terribles

Les hommes sortent en souriant. Nous continuons de papoter, je suis étonnée, que Maryse ne suive pas ses neveux.

Nous sortons de table et allons au salon, Catherine apporte le plateau pour le café. Patrick fait le service.

Les conversations vont bon train, quand enfin Patrick demande cette question qui m’interpelle

... Maryse, ne vas-tu pas avec les gars ?

.... Si, ils vont venir me chercher je pense quand ils les auront reçus

Marjorie entre dans le salon ........Monsieur Jorelle demande si madame de Chambault veut bien venir

Maryse les yeux pétillants de malice se lève ........ Avec plaisir, mon petit

Marjorie tend son bras à la tante, elle glisse sa main dessous. L’employée lui fait un grand sourire et l’emmène

Patrick et mon père discutent de la difficulté de faire passer un entretien, entre les affabulateurs, les stressés, et autres

Manou papote avec Anne-Marie. Je me lève et sors, je demande mon manteau à Marjorie qui gentiment l’ouvre pour que je glisse mes mains dans les manches

... Merci Marjorie

... Je vous en prie madame Jorelle.

....... Si je ne suis pas rentrée, vous pourrez dire à mon mari que je suis sortie prendre l’air

....... Oui madame

Elle ouvre la porte. Dehors l’air est vif, je resserre les pans de mon manteau et monte jusqu’à la gloriette. La petite donne des coups, je souris. De la sentir vivre m’emplit de bonheur.

Je m’installe comme je peux, m’appuyant sur les lattes en bois et allonge mes jambes sur le banc. En fermant les yeux j’essaie de rassembler mes idées. Quelle est cette attitude ce midi de Christine ? A quel jeu elle joue ? Était-ce parce que Lise n’était pas là ? Pense-t-elle avoir une nouvelle chance ? Mais alors le parrain de Quentin ? L’a-t-elle vraiment dragué ? Ou s’est-elle rendu compte que de ce côté-là il n’y aurait pas d’espoir ?

Je chasse mes pensées et essaie de visionner la future chambre de ma petite puce. Margaux Jorelle. Jorelle Margaux. Margot ou Margaux ? J’essaie de l’imaginer trottinant dans le parc, et moi l’appeler, faire coucou derrière les arbres et l’entendre rire aux éclats. Je souris.

Avec du mal, je balance mes jambes par terre et me lève en m’aidant de mes mains en appui sur le banc, doucement je descends les quelques marches en bois, qui sont glissantes et remonte l’allée tranquillement.

Je donne mon manteau à Marjorie et lui demande si mon mari est sorti du bureau

....... Non madame Jorelle

J’entre dans le salon ou je retrouve tout le monde sauf les deux cousins et la tante. Manou me demande si tout va bien.
....... Oui manou, je suis juste aller prendre l’air un peu, pour faciliter la digestion

...... Oui ma poupée. Il fait froid dehors ?

..... Non ça peut aller, tu veux aller prendre l’air un peu aussi ?

...... Tu m’accompagnes ?

...... Oui bien sûr manou.

Ma grand-mère se tourne vers Anne-Marie ....... Vous vous joignez à nous ?

Anne-Marie ...... Avec plaisir.

Nous voilà parties toutes les trois, Marjorie me donne à nouveau mon manteau, en riant je m’excuse.

...... Désolée je ressors

Elle sourit ...... Madame Jorelle, je suis là pour vous servir.

...... Merci Marjorie

Toutes les trois, nous allons jusqu’à la gloriette sachant que nous serons un peu abritées de ce petit vent froid.

Je donne le bras à chacune des femmes. Manou à ma gauche et ma belle-mère à ma droite

Nous nous asseyons, en riant manou fait remarquer que ces bancs sont durs.

Je ris ....... Il faudrait demander des petits coussins.
Manou ....... En voilà une bonne idée.

Je regarde ma grand-mère et remarque son air soucieux, je questionne sans détour

....... Manou, tu ne m’as pas fait sortir pour me dire que les bancs sont durs, qu’est-ce qui te chagrine ?

...... C’est difficile à t’expliquer ma poupée.

....... Qu’est-ce qui se passe ? Tout va bien avec Patrick ?

Manou sourit ...... Oui mon mari est un amour, ma puce

....... Dis-moi manou

Je regarde ma belle-mère qui ne dit rien, elle d’habitude si volubile. ...... Anne-Marie qu’est-ce qui se passe ?

Je commence à m’alarmer, mon pouls s’emballe, je me sens perdre mes couleurs.

Anne-Marie .......  Mélissandre, c’est une histoire un peu compliquée, cela concerne Christine.

....... Christine ? Qu’est-ce qu’elle a fait ?

Manou ....... En fait, nous voudrions savoir si le cousin de ton mari et Lise, sont ensemble.

...... Comment ça ensemble ?

....... Est-ce qu’ils flirtent ?

...... Non je ne crois pas, ils sont amis, ils s’entendent bien, c’est tout.

Anne-Marie ...... Alexandre aurait été peut-être maladroit, ou Christine aurait peut-être mal interprété

...... Mais interprété quoi ? En quoi Alexandre aurait pu être maladroit ? Je ne comprends rien, expliquez-vous

Anne-Marie ....... Alexandre aurait défloré Christine et tout de suite après, quand il a rencontré Elise, il l’aurait laissé tombée

Je les regarde tour à tour, je me sens vider de mon sang. Je voudrais parler mais aucun son ne sort de ma bouche. J’ouvre grand mes yeux.  Mon pouls bat à cent à l’heure.

Manou ....... Nous craignons des problèmes comprends-tu ?

..... Des problèmes comment ? 

A.M ..... Déflorée, ou si tu préfères, il lui a pris sa virginité

Je me réveille d’un coup ....... Oui, j'avais bien compris. Patrick est au courant ?

A.M ....... Non c’est à moi qu’elle en a parlé.

...... Elle t’en a parlé quand ?

...... Très récemment.

...... Et ça serait arrivé quand ?

...... Aux alentours de Noël, il semblerait.

....... Et où ?

...... Chez lui.

....... Je n’y crois pas !

Manou ...... Tu sais c’est un homme, et si Christine l’a un peu aguiché, c’est une réaction presque normale

....... Manou, ne dit rien à Patrick, je vais essayer d’en savoir plus

A.M ...... Ne la braque pas Mélissandre, elle est tellement malheureuse depuis.

Je souris à ma belle-mère ....... Christine est mon amie, je ne vais certainement pas la brusquer. Manou je te téléphone dans la semaine, tu tiendras Anne-Marie au courant. Je vous dirai. J’irai manger avec elle dans la semaine

....... Merci ma poupée

...... De rien manou, et si jamais ça s’avère qu’Alexandre lui a fait du mal, alors j’en parlerai à Matthieu

Anne-Marie ...... Merci ma grande.

Je prends sur moi, je surjoue, j’essaie d’être le plus naturel possible, mais au fond de moi je suis complètement vidée. Je propose aux femmes de rentrer et de ne rien laisser paraitre.

Dans le salon, les cousins discutent avec la tante, Patrick et mon père. Christine écoute, un léger sourire aux lèvres.

...... Tout va bien darling ?

Je sais que je suis pâle, je souris ....... Oui ne t’inquiète pas, alors ces entretiens ?

Maryse enjouée ....... Nous avons trouvé une charmante jeune femme.

Alexandre...... Ne vous emballez pas ma tante, nous verrons au fil du temps

...... Oui, oui mon grand, bien sûr, mais je pense m’entendre avec elle.

Je regarde la tante qui a les joues roses d’émotion, les yeux brillants de plaisir ....... Voyez Maryse tout va aller pour le mieux.

Elle rit de ce petit rire joyeux, 

L’apéritif est servi, les conversations se croisent, l’ambiance est à la joie et au plaisir d’être réunis. Après diner mon père et sa femme nous quittent, emmenant Christine qui tout le repas essayait d’attirer mon attention, chaque fois je détournais le regard.

Blottie dans les bras de mon mari, je lui demande quand est-ce que cette dame prend son poste

.... Lundi pourquoi ?

... Non par simple curiosité.

Matthieu me sert dans ses bras. Je m’endors rapidement.

Le dimanche est calme, nous partons en fin d’après-midi. Matthieu ayant un dossier à voir.

Dès mon arrivée, je préviens mon mari et vais embrasser Patrick sans m’attarder. Les deux dictaphones sont sur mon bureau. Je m’empresse de me mettre au travail. Commencer à dix heures, c’est bien, mais après je me sens surbookée. De plus comme un fait exprès le téléphone n’arrête pas de sonner.

Une bonne heure après, je dépose le parapheur de Matthieu sur son bureau. Je commence le courrier de Patrick, heureusement il n’y a qu’une dizaine de lettres.

Mon téléphone sonne, je décroche dans un mouvement d’humeur.
....... Bureau de monsieur Jorelle

....... Ma belle je pensais te voir ce matin.

...... Oh ma chérie, tu es au taf ?

...... Oui bien sûr, on mange ?

...... Oui viens, je termine pendant ce temps -là.

Je me remets vite à la frappe, il me reste deux lettres. J’envoie l’imprimante et continue. Ma porte s’ouvre sur Ghyslaine, je ne me laisse pas distraire.

Enfin, la dernière feuille tombe dans le panier. Je vais embrasser mon amie

...... Bah dis-donc, ma belle tu as pris des rondeurs

Je souris ....... Et toi tu le mets ou ce petit Marc Junior.

Elle ouvre son manteau, un léger petit ventre rebondi sous son pull.

...... Je porte ça à Patrick et je suis à toi.

Je pose le parapheur, et marque un petit mot disant que je suis partie manger avec Ghyslaine

.... Voilà madame Germain je suis à vous.

J’enfile mon manteau, nous descendons par l’ascenseur et allons chez les normands.

A peine assises, Ghyslaine me dit ....... Bon allez raconte

J’éclate de rire ... Non c’est à toi de me raconter

....... Je t’ai tout dit !

...... Bien moi je vais t’en apprendre une meilleure.

La patronne nous amène une assiette de salade de riz et nous propose poulet rôti ou langue de bœuf, nous choisissons langue de bœuf. J’attends qu’elle aille à la table suivante et doucement, je raconte en détail ce que j’ai appris samedi

Ghyslaine me regarde avec des yeux ronds ....... C’est une plaisanterie j’espère.

....... Non ma biche, ce n’est pas une plaisanterie, je ne pense pas que ma grand-mère rigole avec des conneries pareilles

La serveuse, pose nos assiettes chaudes, nous attaquons sans parler. En dessert devant une belle tarte aux pommes, Ghyslaine attaque

...... Malheureusement c’est sa parole contre celle d’Alexandre.

...... Oui sauf, que j’ai retourné le problème dans ma tête, et que, soit- disant ça se serait passé chez lui, or elle n’y a jamais mis les pieds.

....... Tu en es sûre ?

...... Absolument certaine. Lise est venue avec nous, mais Christine ne connait que le cabinet médical

...... Elle se rétractera, elle dira que c’est chez lui dans le cabinet.

....... Comment la confondre ?

....... Hum, elle est rouée tu sais. Tu connais chez Alexandre, et puis je peux demander à Marc. On lui dit qu’il a changé la couleur de son couloir ou un truc comme ça

...... Et ?

...... Bah déjà ça éliminera le lieu.

Je réfléchis en regardant mon amie…..... De toute façon il y a un truc qui ne colle pas, mais je n’arrive pas à savoir quoi

...... Comme quoi ?

....... Lise est revenue chez nous et je me rappelle très bien la date, le 13 octobre, et déjà Alexandre était détaché de Christine.

....... Chez vous, chez toi et ton mari ?

...... Non au domaine, ça été la première invitation que Matthieu a fait à mon oncle et ma tante. Et justement il avait eu idée de les inviter au domaine pour ne pas qu’ils soient mal à l’aise, il y avait tout le monde, mes parents, enfin mon père et Anne-Marie, Christine évidemment, manou et Patrick, Alexandre et nous et bien sûr Maryse

....... Mais en octobre ils étaient toujours ensemble.

...... Non, enfin Alexandre commençait déjà à se détacher, et un truc me revient, quand Alexandre est arrivé, il s’est assis à mes côtés, j’avais laissé une place à côté de Matthieu et j’ai presque forcé Lise à s’assoir à côté de lui.

Ghyslaine semble réfléchir .... Bon d’accord, mais ce n’est pas suffisant.

...... Il faut demander à Lise quand Alexandre lui a offert une affiche à Montmartre.

...... Pourquoi ? Quel rapport ?

...... Je n’ai pas en tête la date, mais c’était vers novembre, nous sommes tous allés manger chez mon oncle, et l’après-midi on est allé se balader à Montmartre et c’est là que Christine a dit à Lise que c’était qu’une merde

...... Viens on rentre, et on demande à Lise

...... Heu non Gi, je ne veux pas la mêler à ça. Tu sais au moindre faux pas, Matthieu sera sur son dos

...... Je vais me rencarder, semblant de rien et je te dis.

Nous rentrons tout en cherchant une solution pour faire la lumière.

Je vais au standard, boire un café avec mon amie. Lise me reçoit avec un grand sourire. Pendant qu’elle sert le café je lui demande

...... Alors des nouvelles de ton bel apollon ?

Elle sourit ....... Heu oui, il était occupé ce week-end, mais il m’a téléphoné.

....... Woua dit donc mademoiselle Dumont

Elle baisse les yeux pour cacher son trouble ....... Tu es bête.

...... Tu as toujours l’affiche qu’il t’a acheté à Montmartre ?

...... Oui pourquoi ?

... Tu te rappelles la date ?

Elle sourit ...... Oui le samedi 10 novembre, mon oncle avait accepté de me donner mon après-midi il y avait tout le monde

...... Ah oui, c’est ça merci

...... Pourquoi ?

...... Ah non comme ça, juste pour me rappeler quand j’ai vu le médecin pour le bébé

...... Ah d’accord.

...... On te laisse ma Lison ? J’accompagne Ghyslaine à sa visite

...... Oui allez-y, je ne bouge pas.

J’embrasse ma cousine et entraine Ghyslaine qui ne comprend rien et me regarde comme une martienne. Dans le couloir j’éclate de rire. ............Allez viens, on sera tranquille pour parler dans mon bureau.

J’ouvre la porte et laisse rentrer mon amie, je lui demande si elle veut un nouveau café, elle refuse et s’assoit.

D’emblée je lui dis ........ Bon tu vois, en novembre il fait un cadeau à Lise, ce n’est pas pour aller coucher avec l’autre.

Pendant plus d’une demi-heure on passe tout en revue, papier crayon devant moi, je note les dates qui nous semble importantes. Je décroche mon téléphone et appelle ma grand-mère en faisant signe à Ghyslaine de ne pas parler

...... Manou ?

...... Oui ma poupée.
...... Bon aujourd’hui j’ai eu beaucoup de travail ton mari ne me laisse pas de répit

Je l’entends rire dans le téléphone ...... Comment ça ?

....... Je n’ai pas eu le temps de manger avec Christine, mais certaines choses me tarabustent manou, tu voudrais bien m’expliquer exactement ce que Christine à raconter ? 

...... Je ne peux que te dire ce qu’Anne-Marie m’a rapporté.

...... Oui mais bon on sait qu’Anne-Marie ne ment pas, et n’extrapole pas, donc elle a dû te répéter mot à mot ce qu’elle sait.

...... Je ne sais pas au juste, ce serait aux alentours de Noël un peu avant, elle aurait vu Alexandre qui se serait excusé de son attitude, il l’aurait invité chez lui et voilà quoi.

....... Mais manou, il n’y a rien qui t’a choqué ? Elle est toujours chez papa, donc elle serait sortie quand ?

....... Non ça se serait passé un midi.

...... Pendant sa coupure du midi ?

...... Oui, pendant son temps de repas.
....... Attends manou, ne quitte pas.

J’ouvre la fenêtre des horaires, direct je vais sur le service de Gérard et clique sur la fenêtre de Christine, rapidement je jette un coup d’œil entre fin octobre et fin décembre. Je fais défiler la page jusqu’à fin janvier. Je tourne mon écran vers Ghyslaine, en 4 mois elle n’a pas pris une seule fois plus d’une heure le midi.
...... Manou ?

...... Oui je suis là poupée.

...... Tu es sûre que c’est un midi ?

...... Ah oui, oui, Anne-Marie m’a bien spécifié un midi

...... Alors dis-moi comment en une heure, elle peut descendre au cabinet d’Alexandre, discuter et se faire sauter ?

....... Ma poupée, je ne fais que te rapporter ce qu’elle a dit en pleurs à Anne-Marie

....... Bah dis-donc, Alexandre était en manque et lui a sauté dessus.

Manou rit ....... Que te dire ma poupée ?
....... Ce sont des mensonges manou, c’est impossible pour plein de raisons et tu le sais, primo j’ai les pointages de Christine et aucun jour avant Noël et en remontant jusqu’à octobre, elle n’a pris deux heures de coupure

....... Téléphone à Anne-Marie, elle t’en dira certainement davantage, je pense qu’elle n’a pas voulu me peiner, Alexandre étant le fils de mon mari

....... Oui tu as raison Manou, je l’appellerai. Je t’embrasse tout plein

....... Je t’embrasse ma puce.

Je raccroche et regarde Ghyslaine qui a l’air pensive ....... Alors ma biche tu en dis quoi ?

....... Tu peux appeler ta belle-mère ?

...... Tu as le temps ? 

...... Oui, je suis curieuse de comprendre pourquoi elle fait ça.

....... Bah pour faire courir le bruit qu’il l’a violé et comme c’est une famille respectueuse, je pense que Patrick demanderait à son fils de réparer en l’épousant.

...... Non tu plaisantes ma belle ?

...... Bah non ma Gi, c’est ça qu’elle a en tête !

...... La garce !

...... Comme tu dis, tu veux un café ?

...... Ah oui, là j’en ai besoin.

Je me lève et fait couler deux cafés que j’emmène sur ma table de travail, je décroche le téléphone et en regardant sur ma feuille, je compose le numéro

....... Bureau de monsieur Robin bonjour.
Je souris ...... Anne-Marie ?

.... Oui Mélissandre, tu veux ton papa ?

...... Non, est-ce que je te dérange ?
...... Pas le moins du monde.

....... Voilà, je n’ai pas eu le temps de manger avec Christine, et pour ne pas faire d’impaire, je voudrais que tu me dises tout, parce que manou, ne m’a pas appris grand-chose, et tu comprends je ne peux pas aller avec mes gros sabots

.... Oui bien sûr, j’ai minimisé avec manou, sa position est difficile, elle est avec son père.
... Bah oui c’est ça. Christine t’en a parlé quand ?

... Dernièrement, nous étions toutes les deux, ton papa s’était absenté.

... Elle t’a balancé ça comme ça ?

... Disons qu’elle n’était pas bien depuis quelques temps, et j’ai fini par la faire parler

... Récemment ?

... Oui, il y a une dizaine de jours.

... Que ça s’est produit ?

... Non, qu’elle m’a parlé. Après que nous ayons été à Neuilly

..... Le week-end dernier ?

.... Non, vers début février

.... Excuse-moi Anne-Marie, l’histoire date de début février ?

J’entends ma belle-mère rire doucement ....... Non ma grande, j’ai remarqué depuis le début du mois qu’elle n’était pas trop bien, mais l’histoire daterait de Noël.

.... Mais je ne comprends pas, pourquoi elle a attendu deux mois pour en parler ?

... Je peux te parler en toute franchise ?

... Bien sûr, je t’écoute.

... Il l’aurait invité un midi pour manger, ils ont été chez lui. Le cabinet n’est pas loin de votre travail. Et ça se serait passé là.

... Donc chez Alexandre.

... Oui à l’appartement.

... Mais il l’a violé ?

... Non pas violé, ce n’est pas le mot qu’elle a employé, elle a plutôt dit déflorée.

... Mais elle était consentante ?

... Je suppose oui

... Bah alors qu’est ce qui la met mal ?

... A Noël il lui aurait dit que tout était fini entre eux, et c’est pour ça qu’elle n’était pas bien chez ta grand-mère.

... Parce qu’ils étaient toujours ensemble ?

... Ma foi, oui je pense.

.... Et elle t’a dit ça comment ?

... Comme je viens de te dire, elle ne s’est pas vraiment étalée. Elle m’a avoué avoir eu des rapports avec lui vers début novembre et à Noël il lui aurait dit que tout était fini, et maintenant elle regrette de s’être donnée

... D’accord merci Anne-Marie, j’essaie demain de discuter avec elle, et je téléphonerai à manou, elle t’expliquera

... Oui ma grande, essaie de la consoler, parce qu’elle n’a pas le moral

... Oui enfin ce week-end à Neuilly, elle avait l’air d’aller bien

... Oui, elle a toujours l’espoir.

... D’accord, je ne vais pas te déranger davantage, merci Anne-Marie, je t’embrasse

... Moi aussi, je t’embrasse, et porte toi bien.

... D’accord.

Je raccroche et regarde mon amie, en buvant mon café tiédasse.

... Alors ma Gi ?

... Je ne sais pas quoi penser, ça me laisse complètement désorientée.

Je réfléchis et essaie de rassembler mes idées. ……… Donc ce serait début novembre !

Je regarde longuement mon amie …… C’est début novembre qu’on a annoncé ma grossesse

…… Et ?

….. Je pense que c’est ça qui lui a donné l’idée, parce que de toute façon son histoire ne tient pas debout ma Gy

….. Compliqué ma belle, c’est sa parole contre celle d’Alexandre

... J’en parle à Matthieu ?

... Je crois qu’il faudrait oui.

... Alors là, ça va péter dur. Elle va tout perdre, il va la virer, et moi je vais faire en sorte qu’elle dégage de chez mon père

... Je ne comprends pas à quoi elle joue. Elle est folle ou quoi ? Elle était bien chez tes parents, et elle a un job super

Je hausse les épaules en signe d’impuissance à répondre. Ghyslaine me regarde.
...... Ecoute on réfléchit, n’en parle pas tout de suite à ton mari. Après demain on mange avec elle, et on va lui faire cracher le morceau.

...... Oui d’accord. Mais il faut bien mettre notre plan à plat

...... Je vais voir avec Marc. J’ai ma petite idée. Il faut que je retourne voir ta cousine, sinon elle va se demander ce que je fais.

J’embrasse mon amie qui repart, ramasse les tasses sur mon bureau, prends celle près du perco et vais aux toilettes faire la vaisselle.

Je n’ai vu personne à la direction, je décide de rentrer, il est seize heures, et je pense qu’ils ne repasseront pas ou tard.

Dans le bain, j’essaie de rassembler mes idées et de faire un point logique et qui tienne la route.
Pendant le repas à deux reprises Matthieu me demande si tout va bien. J’essaie d’être très naturelle

... Mais oui pourquoi ?

... Si tu es fatiguée tu restes à l’appartement

... Mais non, ne t’inquiète pas, je peux encore tenir quelques temps, je ne suis pas à six mois. Je ne vais pas rester trois mois à faire du lard

Je lui ai fait mon plus beau sourire.

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