Trahison
En cette presque fin de février, il fait un froid terrible. Le thermomètre affiche moins cinq. Je me couvre bien, et bravant ce vent glacial je descends jusqu’au métro.
Le mardi Ghyslaine ne travaillant pas, je mange avec Lise et ne parle de rien. Mon amie me téléphone dans l’après-midi pour m’expliquer qu’elle a demandé à Marc, comment était l’appartement d’Alexandre, devant les questions de son mari, elle a été obligée de lui parler vaguement sans trop de détails du scandale qui risquait d’éclater pour ce médecin tout fraichement installé.
Marc lui a expliqué exactement par un plan toutes les pièces. L’entrée et le petit couloir, la pièce à vivre, la cuisine, les deux chambres, le bureau, la salle de bains et même les toilettes et, il a été jusqu’à lui décrire l’ameublement.
Je demande à mon amie, ce qu’elle compte faire avec ça.
... Demain nous allons manger avec elle, et je vais te demander un truc style, comment tu trouves la cuisine de ton cousin ?
.... Pourquoi la cuisine ?
... Comme ça, Marc me dit qu’elle est rouge-bordeaux, ce n’est pas commun surtout pour un homme.
... Non bien sûr, mais quand tu vas chez quelqu’un tu ne vas pas spécialement dans la cuisine
.... Oui tu as raison, bah on prend quelle pièce ?
.... A savoir déjà où il est censé l’avoir déflorée, dans la chambre, dans le salon ?
Mon amie rit .... Bah écoute on parle de tout l’appartement, comme si nous avions visités suite à une invitation.
... D’accord, et ?
... On mélange les couleurs et on raconte n’importe quoi, mais en nous mettant d’accord pour que ce soit plus crédible.
.... Et c’est ça qui disculpera Alexandre ?
Ghyslaine rit ... Tu es longue à la détente ma belle.
Je souris à mon tour, elle m’explique une partie du plan pour confondre Christine et lui faire avouer qu’elle ne connait pas l’appartement du cousin. Ensuite il faudrait savoir quel jour ça se serait passé
... De toute façon avec les pointages, en une heure ça parait improbable, sauf en septembre ou effectivement elle a pris deux fois deux heures. Je suis remontée depuis les grandes vacances.
... Nous verrons demain ma belle, mais je t’assure que je vais l’acculer au pied du mur.
... Oui, enfin, ça sera toujours sa parole contre la nôtre
... Oui sauf que là nous serons deux, et qu’elle ne pourra pas dire qu’on ment
... Oui sauf qu’on est les deux amies les plus proches et qu’on peut être de connivence.
Un long soupir me parvient dans l’oreille .... Tentons, il faut mettre fin à cette histoire, tu te rends compte, pour un peu si elle change de version et qu’elle dit viol au lieu de défloraison ?
Je pousse aussi un soupir de détresse, j’en aurais presqu’envie de pleurer. D’une part de m’être autant trompée sur cette fille, d’autre part, du scandale qui pourrait être étalé au grand jour, dans les journaux.
Le soir à table j’essaie d’être enjouée et de ne rien montrer à mon mari, au risque qu’il m’intime l’ordre de ne pas aller au bureau, me croyant fatiguée.
Dans notre lit, je l’entreprends d’une manière très suggestive, en reposant sur le côté il rit .... Madame Jorelle qui m’aurait dit que vous aviez un tempérament de feu ?
Je glousse en enfouissant ma tête dans le creux de son bras.
Ce matin Matthieu me dit que je peux venir que cet après-midi, Patrick étant absent jusqu’à la fin de semaine, je n’aurai que son courrier, et il n’y a rien d’urgent. Je ne réponds pas et pars comme d’habitude pour être à 10 heures au bureau.
Je mets un soin particulier à mon maquillage et ma coiffure, en moi-même je pense qu’il me faudrait faire couper mes cheveux de quelques centimètres. Pour cela je demanderai à mon mari d’aller chez manou, Bénédicte est la seule à me satisfaire et je suis toujours ravie de son bon goût
Ghyslaine me téléphone à midi pile .... Salut ma belle, je suis dans le bureau de Christine, ça te dit qu’on mange avec elle ?
Je fais la fille super enjouée ... Bah pire, oui. Je n’ai même pas le temps d’aller l’embrasser, la pauvre
.... Ok on se retrouve dans le hall.
... D’accord
J’enregistre la lettre que j’ai commencé, ferme la page et mon pc. J’éteins le dictaphone, quand soudain une idée me vient à l’esprit. Je vais dans le bureau de Patrick et rafle le sien qui est sur le bureau, je vérifie qu’il soit à zéro sans aucun message
Je le range dans la poche de mon manteau. Bon ça fait un peu gros, et ça se voit, je le glisse dans mon sac.
J’embrasse Christine, à contre cœur, tout en faisant semblant d’être ravie de la voir. Je vais saluer madame Morane, lui dit quelques mots gentils. Nous partons.
Sur le trottoir, nous décidons d’aller à la Casa. Je m’arrange pour être dans le coin, et pose mon sac sur le bout de la table, je fais celle qui farfouille dedans et appuie sur enregistrement.
Je fais un grand sourire à Christine ... Alors, tu vas bien ?
... Oui pourquoi ?
Je souris ... Bah pour savoir, le boulot pas de souci ?
... Non pas spécialement.
Je jette un coup d’œil à mon amie, Christine est fermée, et il va être difficile de la faire parler
.... Tu as un problème ? Je ne te sens pas en pleine forme.
... Non pas de problème en particulier.
... Pas en particulier mais il y en a un quand même non ?
La serveuse vient prendre nos commandes, j’attends qu’elle reparte et d’une voix que je veux douce et complice
.... Christine, nous sommes tes amies, tu sais que si quelque chose te tracasse tu peux nous en parler.
Sa réponse me déroute .... Tu te dis mon amie.
.... Comment ça ? Bien sûr que tu es mon amie, tout comme Ghyslaine, vous êtes les seules amies que j’aie
... C’est pour ça qu’en famille tu ne m’adresses pas la parole, ou alors tu m’envoies des vacheries dans la tête
.... Je ne te parle pas ? Tu as vu ça où ?
... Samedi tu ne m’as pas adressé un mot
Je commence à m’énerver ... Dis-moi Christine, tu ne te fous pas un peu de ma gueule ? Quand je te demande si tout va bien, ta réponse est inévitablement .... Bah oui pourquoi ?
... Et tu veux que je te réponde quoi ?
... Je ne sais pas, que tu me parles de ce que tu fais au boulot, si je demande c’est pour entamer un pseudo sujet et je te laisse démarrer
... Je n’ai rien à raconter, tu veux que je te dise ce que j’ai mangé chez ton père ?
... Oui pourquoi pas ? Ou quand tu sors, ou ce que tu regardes à la télé, ce que tu bouquines, je n’en sais rien moi
... Quand je sors, à part avec ton père et ta belle-mère je ne sors pas, même plus avec ta grand-mère
Ghyslaine sourit à Christine ... Tu sais moi aussi, c’est maison boulot, Mélissandre, pareil, mais nous en parlons, il n’y a rien de bien méchant. Par exemple le midi, pourquoi tu ne viens pas manger avec nous ?
La serveuse amène nos assiettes qu’elle dépose devant chacune de nous, nous la remercions. D’emblée Christine prend son couteau et sa fourchette.
Je repose la question ... Pourquoi le midi tu attends toujours qu’on t’invite, pourquoi tu ne montes jamais boire un café avec moi ?
Elle hausse les épaules ... Je ne sais pas si je ne vais pas déranger.
... Christine, tu ne pousses pas un peu là ? Je nous pensais suffisamment liées pour être honnête l’une envers l’autre
... Comment ça.
...... Si tu m’appelles pour manger, je vais te dire oui ou non, ce n’est pas plus compliqué, comment on fait avec Ghyslaine ?
Ghyslaine tout en coupant des parts de sa pizza demande, sans lui laisser le temps de réfléchir ... Mais alors le midi tu manges avec qui ?
... Avec les filles du bureau
... Tous les midis ?
... Bah oui pourquoi ?
... Et vous parlez de quoi ?
... De rien en particulier.
... Donc tu sais faire.
Christine regarde Ghyslaine de travers .... Pourquoi ?
Gi ... Pourquoi quoi ?
... Pourquoi tu me dis ça
Je sens que la conversation va tourner en rond. J’interviens
...... Mais si tu manges tous les midis avec les filles, tu ne vas jamais te balader ?
....... Comment ça me balader ? Je n’ai pas le temps en une heure
....... Ma chérie, nous avons des heures flexibles, tu pourrais prendre deux heures pour je ne sais pas faire les magasins par exemple
....... Je les fais le samedi avec ta belle-mère.
...... Et quand tu mangeais avec Alexandre, tu prenais qu'une heure ? Vous n’avaliez pas un sandwich quand même
Elle se rembrunit ....... Oui je prenais deux heures, c’est arrivé deux fois, après il m’a dit qu’il n’avait pas le temps
....... Ma chérie, tu sais le midi, souvent il est en consultation, il a un boulot chargé
....... Ah ! Et donc le midi, il ne mange pas.
...... Si mais je suppose sur le pouce et quand il peut
Elle baragouine un truc que je ne comprends pas. Nous mangeons en silence. Je suis contrariée, on ne lui a rien soutiré qui puisse faire que. Je repousse mon assiette, sans finir ma pizza. Ghyslaine non plus, ne termine pas
La serveuse, nous demande si nous voulons les emmener
...... Prends-les Gi, ça vous fera une entrée pour ce soir.
Ghyslaine sourit à la serveuse ...... Je veux bien oui.
La jeune femme repart. J’essaie de faire durer le repas.
....... On prend un dessert ? J’ai envie d’une glace.
Ghyslaine rit ....... Gourmande.
Je fais l’étonnée .... Christine, tu n’as pas envie d’une glace ?
.... N’importe !
Nous commandons des glaces. Sans attendre Ghyslaine attaque carrément dans le vif du sujet
...... Les filles vous êtes allées chez Alexandre ?
Je fais la fille désabusée ........ Bah non pas depuis que son appart est fini. Il ne nous a même pas invités.
Gi ....... Ah bon, bah quand même. Il nous a invité avec Marc
....... Tu en as de la chance toi.
Je me tourne vers Christine ...... Et toi tu as été invitée à visiter ?
...... Ah non, je n’ai pas eu cette chance.
Gi ....... Comment ça ? Tu sors avec lui, et il ne t’invite même pas chez lui ?
La fille pose les coupes devant nous, je ne m’en occupe pas et continue. ...... Christine tu as bien été chez Alexandre.
....... Tu me prends pour une menteuse ?
.... Non ma biche, ce n’est pas ce que je voulais dire, mais j’étais persuadée que tu étais déjà montée chez lui.
...... Juste le jour du pot et on était tous ensemble
....... Ah donc ce jour-là, tu es montée.
....... Non pas du tout, je l’ai aidé à préparer c’est tout !
...... Oui enfin, quand il te demandait de l’aide pour décorer, tu ne t’investissais pas non plus
...... Ce n’est pas chez moi, il peut bien faire comme il veut
...... Mais ma chérie, quand on est en couple on fait les choses à deux.
....... En couple ? Quel couple ?
Je la regarde faisant l’étonnée ....... Vous étiez bien en couple, vous avez bien eu des rapports. Si on couche c’est qu’on aime non ?
Elle me fusille du regard, je ne me laisse pas impressionnée
....... Christine, vous avez fait l’amour ou pas ?
...... Je n’appelle pas ça faire l’amour.
....... Il ne t’a pas violé, tu étais consentante, donc ça s’appelle faire l’amour chez moi.
Ghyslaine qui ne veut pas être en reste demande comment je sais ça.
....... Ma Gi ce n’est pas à moi de te parler des ébats de Christine et Alexandre dans le parc de Neuilly !
Christine me foudroie du regard et pleine de hargne me jette à la figure ...... Ne te gêne pas, raconte à tout le monde, qu’il m’a prise sur la pelouse chez sa tante
J’essaie de réprimer ma colère, je ne veux pas qu’elle arrête là les révélations. ...... Christine, ne déforme pas la vérité.
..... Quelle vérité ?
..... Christine je connais le parc de Neuilly comme ma poche, c’est bien toi qui lui faisais une fellation, ce n’est pas lui qui te l’a mise dans la bouche !
...... Et alors ? Tout ça pour me dire à Noël qu’il me jetait pour ta salope de cousine.
...... Christine n’inverse pas les rôles. Quand on fait une fellation à un mec, bah il faut savoir qu’il a envie d’aller plus loin, même si vous n’êtes pas en relation
Ghyslaine me regarde avec des yeux moitié horrifiés. Elle ouvre la bouche sans pouvoir parler. Sur ma lancée j’enfonce un peu plus le clou en essayant de viser juste, d’imaginer ce qui a pu se passer
........ Ne t’a-t-il pas dit d’arrêter ? N’a-t-il pas demandé ce que tu faisais ? Ne t’a-t-il pas repoussé ?
Elle évite la question ........ Tu lui as dit à ta cousine ? Tu l’as mise en garde aussi ?
..... Christine, on ne parle pas de Lise, on parle de toi. Alexandre t’a violée ou pas ?
Elle éclate d’un grand rire, proche de la crise de nerfs ....... Il n’est même pas capable d’aller au bout d’une pipe !
La colère m’emporte et d’une voix aigüe je lui jette en pleine tête ........ Et c’est pour ça que tu dis à ma belle-mère, à ma grand-mère qu’il t’a violée ?
.... Je n’ai jamais dit ça.
..... Tu as dit quoi alors ?
D’un bond elle se lève, attrape son manteau et pars en courant. Avec Ghyslaine nous restons comme deux connes. La serveuse vient voir si nous voulons des cafés. Je refuse
....... Nous le prendrons là-haut, viens on rentre.
Je règle les trois repas, nous repartons en silence. Je vois Ghyslaine complètement abasourdie.
Je pose les tasses chaudes sur mon bureau et de mon sac sors le dictaphone, Ghyslaine suit mes gestes sans parler.
D’un coup elle comprend et éclate de rire ....... Non tu as fait ça ?
Je souris ....... Comme ça, elle ne pourra pas nier.
J’enclenche la lecture, les voix sont nettes, nous pouvons écouter toute la conversation, et le repas jusqu’au bout.
Je fais deux nouveaux cafés et demande à Ghyslaine ce qu’on en fait.
....... Parles-en à ton mari, et fais-lui écouter.
........ Alors pas avant ce soir, il ne passe pas au bureau
........ D’ac tu me tiens au courant ? Je vais aller voir ta cousine, elle va râler que je prends trop de temps pour manger
Je souris ... Non je ne pense pas, je viens avec toi
Je range le dictaphone dans mon tiroir que je ferme à clé. Je vais embrasser ma cousine, refuse le café et papote un peu avec elle. Je lui dis en partant .... Embrasse tonton et tata
........ Oui t’inquiète
J’ai hâte d’être à ce soir, pour parler à mon mari, et mettre tout ça au grand jour.
En rentrant, je m’installe sur le canapé, avec mes fiches de cours. Matthieu m’a téléphoné pour me dire qu’il ne rentrerait pas tard. Je l’attends avec impatience. J’ai demandé à madame Breton de servir un verre dès que son patron arrive
.... Madame Jorelle, est bien studieuse !
Je lève la tête et sourit, il est là devant moi, dans toute sa splendeur, son sourire tueur aux lèvres. Je me lève avec empressement et vais me coller à lui.
....... Monsieur Jorelle, je suis bien obligée au risque d’être malmenée.
Je le sens taquin et de bonne humeur ....... Madame Jorelle, dans votre état ? Hum j’ai un doute
Je me hisse sur la pointe des pieds et pose mes lèvres sur les siennes. Il force ma bouche, nous échangeons un long baiser qui fait courir des frissons tout le long de mon dos. Je me ressaisis, il ne faut pas que je me détourne de ma mission.
Je l’attire vers le canapé, ramasse mes fiches et les pose sur la table. Madame Breton arrive avec son petit plateau portant deux verres.
Matthieu desserre sa cravate et enlève sa veste qu’il tend à son employée. Je cale mes jambes sous mes fesses et lui demande si tout va bien
.... Oui darling, j’ai fini, et Patrick aussi.
... Super, tu vas pouvoir te poser un peu, je m’ennuie seule à la direction.
Il sourit et trempe ses lèvres dans son whisky. Je demande si ce soir il a du travail
.... Non darling, veux-tu sortir un peu ?
Je fais non de la tête ........ Matthieu j’ai une chose grave à te dire, mais je ne veux pas que tu t’énerves après moi.
Il me regarde intensément, ses yeux plongent dans les miens, me troublant
........ Qu’as-tu fait ?
J’essaie de sourire, mon pouls s’emballe, comment lui présenter ça ? Je n’ai rien préparer. Je me jette d’un coup.
...... Ce que j’ai à te dire est difficile alors laisse-moi parler.
..... Je t’écoute !
....... Voilà, manou et Anne-Marie m’ont parlé d’un gros problème concernant Alexandre. Et heu ........ Je voulais m’assurer que c’était vrai.
....... Mélissandre, ne fais pas de détour, que se passe-t-il avec mon cousin ?
Et d’un bloc je raconte tout, les appels téléphoniques à manou et Anne-Marie, le repas de ce midi et les aveux de Christine
Au fur et à mesure le regard de Matthieu fonce, il devient blême, et d’une voix ou perce la rage.
....... Quel crédit pouvons-nous porter aux dires de mademoiselle Frontasky, et quelle défense aura Alexandre, c’est une parole contre une autre, ne dira-t-elle pas que tu mens ?
Je me lève et dans mon sac, je prends le dictaphone ....... Monsieur Jorelle, je suis bien plus rusée qu’elle !
J’enclenche la lecture et tends l’appareil à Mathieu. Il écoute jusqu’au bout. Je le laisse et demande à madame Breton de servir un nouveau verre à son patron. Je pense qu’il va en avoir besoin
En fin de bande, il repose le dictaphone à côté de lui ....... Dans quel but ?
...... De se faire épouser ! Sachant que Patrick demanderait à son fils de réparer
...... Va-t-on un jour, être tranquille ?
Il parle la voix éteinte, dans un état de lassitude et d’incompréhension complète
........... Quand tout va bien d’un côté, il faut que ça merde de l’autre. Est-ce qu’une fois, une seule fois, il n’y aura pas de problème ? Les bonnes femmes ne sont bonnes qu’à se bouffer la laine sur le dos. Dorénavant je n’embaucherai que des hommes, au moins je serais tranquille !
Il pousse un soupir ....... Allons diner !
Le repas est triste, je n’ose pas parler et le laisse dans ses pensées. Dès la dernière bouchée avalée, il se lève, vient effleurer mes lèvres et s’enferme dans son bureau. Je le soupçonne de téléphoner à son cousin.
Après une rapide douche, je prends mon livre prénatal que je ne me lasse pas de lire et vais me coucher
Matthieu n’est pas long à me rejoindre.
Je pose mon bouquin, et me colle à mon mari, sans aucune arrière-pensée, juste être près de lui, sentir son odeur de gel douche, sentir sa peau contre ma joue. Je m’endors rapidement.
En arrivant, au bureau je téléphone tout de suite à Ghyslaine chez elle. Elle ne travaille pas ce jeudi.
En quelques mots je lui raconte la soirée d’hier avec Matthieu, les explications et son dégoût pour ce nouveau problème. Une bonne heure après je raccroche et fais le courrier que mon mari de PDG m’a laissé.
Je n’en ai pas pour une heure, je lui porte le parapheur.
........ Darling, mangeons ensemble ce midi, j’ai contacté Alexandre.
.......... D’accord oui. Lui as-tu parlé ?
...... Oui sans lui dire qu’un enregistrement existait, je veux les deux versions. Ensuite j’aviserai
....... Mais ton cousin n’est pas responsable.
....... Il est responsable de s’être accoquiné avec une traine savate.
Son ton sec me remet en place, je quitte son bureau en colère. Il n’a pas à s’en prendre à moi. Quand j’ai mis Christine en garde, ils ont tous été contre moi, alors qu’ils ne viennent pas m’attaquer encore une fois.
Je téléphone à Lise pour lui dire que je mange avec Matthieu.
.... T’inquiète ma Méli, je mangerai avec les filles. Bon appétit, passe le bonjour à ton mari
... Ok, ça marche ma Lison, je viendrai pour le café, promis
Matthieu vient me chercher, je vois à son air sombre que tout ne va pas être rose, il m’entraine à l’ascenseur, nous descendons au parking et montons en voiture. Je ne pose pas de questions. Il accède à un parking souterrain. Nous sommes au Palais Royal.
Nous remontons en surface, main dans la main. Mon mari me guide vers un grand restaurant. Un type nous ouvre
.... J’ai réservé au nom de Jorelle
...... Si vous voulez bien me suivre
Le même type nous conduit à une table, tire une chaise pour que je prenne place. Mon mari se met à côté de moi. En face une seule assiette.
Alexandre un grand sourire aux lèvres vient se joindre à nous.
....... Bonjour belle cousine.
Il me fait la bise, embrasse son cousin et s’assoit. Matthieu commande l’apéritif et un jus de fruits.
Alexandre ... Ce n’est pas une belle garce ?
Matthieu sourit en hochant la tête ...... Heureusement que mon épouse à la tête bien vissée sur les épaules. De plus madame Germain est aussi témoin.
........ Tu as l’enregistrement ?
Matthieu fouille dans la poche intérieure de sa veste et sort le dictaphone, il appuie sur lecture. Nos voix se font entendre.
Le serveur nous amène les menus, connaissant le discours, je me plonge dans sa lecture et fais mon choix.
Tout en mangeant, les deux cousins mettent au point un stratagème, et même si je n’écoute qu’à moitié, occupée à savourer mon veau sauce forestière, le peu que je capte me déconcerte.
Sur le trottoir nous faisons la bise à Alexandre, qui part de son côté, nous rejoignons la voiture au parking et rentrons au travail. En chemin Matthieu me recommande de ne parler de rien à personne.
....... A qui veux-tu que j’en parle ?
....... Ta cousine par exemple !
....... Mais non, elle n’est même pas au courant du début de l’histoire.
....... Parfait, et je te garantis, que Frontasky a très mal joué, sur ce coup-là !
Son ton de colère me fait froid dans le dos. Je ne réponds pas. En arrivant je vais directement au standard boire un café avec Lise. Heureuse de me voir, elle me saute au cou.
...... Ah ma Méli, je pensais ne pas te voir aujourd’hui.
...... Désolée, j’avais du boulot ce matin, et à midi Matthieu voulait qu’on déjeune ensemble.
....... Pas grave je comprends.
Nous buvons un café tout en parlant et riant de tout et de rien. J’essaie de me détendre. Je reste un bon quart d’heure avec ma cousine et regagne mon bureau.
Vendredi, Ghyslaine est au travail, nous mangeons ensemble, vite fait je lui explique le plan machiavélique des deux cousins.
....... Il y aura ta grand-mère ?
...... Ah oui bien sûr.
...... Donc monsieur Duval sera là.
Je souris ....... Bah oui !
Elle éclate de rire ........ Oh, comme j’aimerais être une petite souris.
Je ris aussi, et lui promets de tout lui raconter.
Il est à peine seize heures, quand Matthieu me demande de me préparer, nous allons directement à Neuilly.
Au salon Maryse est en compagnie d’une jeune femme, la quarantaine. Les deux femmes papotent plaisamment.
Maryse m’embrasse et me présente ........ Mon petit je vous présente Laurence Billon
Je me tourne vers la jeune femme qui s’est levée et lui serre la main ... Bonjour madame Billon
.... Bonjour madame Jorelle, mais je vous en prie appelez-moi Laurence
Je lui souris et m’assois. Matthieu est allé directement dans son bureau poser sa mallette. Il entre dans le salon, je le sens d’humeur moyenne. Après un signe de tête à Laurence, il embrasse sa tante et vient prendre place à mes côtés
.... J’ai invité mes beaux-parents pour demain midi
.... Excellente idée.
.... Vous demanderez une paëlla en cuisine
La tante narquoise ... Et pourquoi une paëlla ?
... Parce que je n’ai pas envie d’une choucroute, tout simplement
La tante me demande si c’est mon souhait
Je ris .... Maryse, ce que veut mon mari, me convient parfaitement
Matthieu enlace mes épaules et m’attire à lui .... Madame Jorelle, je m’en vois ravi. Si ce n’est que ce n’est pas toujours la vérité !
Je tourne ma tête vers lui ... Comment peux-tu être autant de mauvaise foi ?
Il rit, de ce rire que j’adore .... Mettriez-vous mes dires en doute madame Jorelle ?
Je dépose un léger baiser sur ses lèvres .... Monsieur Jorelle, jamais de la vie, oh quelle vilaine pensée.
... Veux-tu un café ?
... Non merci.
Il fait un geste à Catherine .... Servez-moi un café s’il vous plait
... Oui monsieur
Matthieu se tourne vers la dame de compagnie, qui n’a pas dit un mot, les mains croisées sur ses genoux, droite comme un I, je la sens raide et mal à l’aise
...... Qu’avez-vous fait cette semaine ?
D’une voix claire elle explique .... Lundi nous avons fait plus ample connaissance avec madame la comtesse, mardi nous avons joué au bridge, puis j’ai appris à madame la comtesse à jouer au rami. Mercredi nous sommes sorties en ville, Georges nous a conduit, jeudi nous sommes allées au cercle de madame et cet après-midi nous sommes restées ici.
...... Bien ! Si ma tante s’en satisfait, c’est parfait.
Catherine amène un café à son patron, comme à son habitude il l’avale en deux gorgées et se lève
...... Ma tante, excusez-moi, je vous ai amené votre nièce, mais j’ai un dossier à finir
...... Oui va mon grand.
Il effleure mes lèvres et sort.
Maryse me demande s’il a des soucis,
.... Pas que je sache. Il est fatigué je pense.
...... Prendrez-vous quelques jours ?
Je hausse les épaules dans un signe de méconnaissance. ....... Il ne m’a parlé de rien.
..... Comment vous sentez-vous ?
Je souris ... Elle bouge bien, le gynécologue comme Alexandre, me disent que tout va bien, elle a grossi.
....... Plus que trois mois pour voir ce petit trésor, il me tarde tant.
Je ris ...... Oh moi aussi, je crois que ce sera une coquine pleine de vie
.... Neuilly va reprendre un peu de vie, d’entendre un enfant babiller sera un grand bonheur.
... Je m’en doute, mais n’allez pas la choyer outrageusement.
La tante rit, ses yeux pleins de malice .... Un tel trésor à droit à tous les bonheurs.
... Hum, je ne suis pas sûre que Matthieu vous laisse faire.
... Je ferais bien comme j’en ai envie, tant que cela ne vous froisse pas
... Mais non Maryse, je sais que vous ferez avec votre grande générosité, et votre gentillesse.
La tante, j’en suis sûre à rosit légèrement. Je demande si manou sera là demain
.... Oui bien sûr, Patrick et Odette, tiennent à venir se ressourcer au domaine pour mon plus grand plaisir
... Super alors
Nous papotons pendant deux bonnes heures dans la joie et la complicité. J’aime beaucoup la tante, c’est une femme charmante, généreuse et toujours bienveillante. Sa douceur met le calme entre l’impétuosité des deux cousins
Matthieu fait servir l’apéritif et deux jus de fruits. Un pour Laurence et un pour moi. Il allonge ses jambes et croisent ses pieds l’un sur l’autre. Je sais que dans cette position, il n’est pas dans un calme absolu, j’ai appris à reconnaitre certains signes.
Il boit une gorgée de son whisky et attaque sa tante d’un ton qui dément la douceur ....... Demain je me dois de discuter avec mon beau-père et sa compagne, Patrick et manou seront présents, je vous prierais de garder pour vous toute intervention.
....... Si c’est un échange personnel, alors fais-le dans le bureau et non en public.
...... Disons, qu’il est préférable que vous soyez tous à l’écoute !
...... Vas-tu te quereller avec Bernard ?
...... Pas le moins du monde, juste mettre certaines choses au point
....... Lesquelles ?
...... Vous le saurez assez tôt ! Passons-nous à table ?
...... Il est à peine vingt heures
...... J’ai du travail madame ! Si je suis là de bonne heure, il n’empêche que les dossiers ne se font pas tout seuls
La tante se lève et malicieuse ...... C’est évident !
Pendant le repas, je remarque la prévenance de Laurence auprès de la tante. Elle la sert, lui remplit son verre, est attentive à ses moindres gestes. Hum j’ai bien peur qu’en fin de compte la tante s’encroute un peu. Je vais essayer d’en parler à Matthieu.
Maryse détend l’atmosphère en papotant légèrement, je ris à plusieurs reprises, et surprends Mathieu à rire aussi. Il se détend et lance quelques boutades à sa tante.
Il reste avec nous au salon, sa tante en profite pour demander s’il ira voir Kevin.
...... J’ai envoyé Sophie une semaine avec son frère
..... Oui j’ai appris, la pauvre petite a dû se faire une joie. Et vous-même, ne prendrez-vous pas quelques jours, l’air de la montagne ferait du bien à ton épouse
........ Je demanderai avis auprès d’Alexandre, à savoir si la voiture ne fatiguera pas trop madame Jorelle, auquel cas, nous irons effectivement voir Kevin quelques jours
... Et sinon ?
...... Et sinon, je laisserai Mélissandre aux bons soins de sa grand-mère, je ne peux faire l’impasse et vous le savez
J’écoute un peu déroutée, qu’il ne m’ait pas parlé de ce futur voyage, je me tourne vers lui et demande un peu sèchement
.... Et je suis sensée le savoir comment ?
... Je voulais t’en parler, mais comme à son habitude ma tante, met les pieds dans le plat avant l’heure du repas !
Maryse s’excuse en souriant .... Que ne parles-tu pas avant le repas dans ce cas-là ?
...... J’ai plus urgent à régler !
J’ai envie de sourire, Laurence du regard, va de la tante au neveu. J’essaie d’imaginer ses pensées, tout comme moi au début lorsqu’ils parlaient de cette même manière sans que, celui qui n’est pas dans ce milieu, ne puisse comprendre.
Je demande la permission, pour la forme de monter me reposer.
...... Va darling, je te rejoins rapidement.
J’embrasse la tante lui souhaitant une bonne soirée.
Tout en me déshabillant, et sous la douche, je pense à demain. La foudre va tomber sur certaines têtes. Je me couche et bouquine en essayant d’attendre mon mari, mais il tarde et je finis par m’endormir.